Bruce Springsteen
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SXSW 2012 Keynote, 15 mars 2012

Voyage Musical



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SXSW 2012 Keynote, 15 mars 2012
Et puis, l’Invasion Britannique. Ma première véritable guitare - en fait j’ai vraiment appris à jouer - et c’était différent : la configuration de la terre a changé. Quatre garçons, qui jouaient et chantaient, écrivaient leurs propres chansons. Il n’y aurait plus de producteur, à part le chanteur, un chanteur qui n’écrivait pas, un auteur qui ne chantait pas. Ce qui a changé la manière dont les choses étaient faites. Les Beatles étaient cool. Ils étaient classiques, bien habillés et ont créé l’idée d’un groupe indépendant où tout pouvait sortir de votre garage.

La pochette de l'album Meet the Beatles ! (12), ces photos de leurs quatre têtes - je me souviens l'avoir vue dans le magasin J. J. Newberry's - c'était la première chose que j'ai vue quand je suis allé en courant dans ce petit magasin bon marché. Il n'y avait pas de magasins de disques. Il n'y avait pas assez de disques, je pense, à cette époque-là. Il y avait comme un coin à côté des jouets, où ils vendaient quelques albums. Et je me souviens m'être précipité à l'intérieur et d'avoir vu cette pochette d'album avec ces quatre têtes. Ils étaient comme les dieux silencieux de l'Olympe. Là était mon avenir, il me crevait les yeux. Et je me rappelle avoir pensé, "C'est trop cool. Je ne vais pas y arriver, je ne vais jamais y arriver". Ensuite dans un fanzine, je suis tombé par hasard sur une image des Beatles à Hambourg. Ils portaient leurs vestes en cuir et avaient leurs cheveux coiffés en banane, ils avaient de l'acné sur le visage. Je me suis dit, "Hé, tiens donc ! Ce sont les types avec lesquels j'ai grandi, vous comprenez, sauf qu'ils s'agissait de rats venant des quais de Liverpool". Sans leurs vestes Nehru et leur coupe de cheveux, ces types, ce sont des gosses. Ils sont beaucoup plus cool que moi, mais ils restent des gosses. Il doit bien exister une manière d'arriver là où ils sont.

SXSW 2012 Keynote, 15 mars 2012
Et puis pour moi, ce fut les Animals (13). Pour certains, c'était juste un autre groupe parmi les vraiment bons groupes de British Beat des années 60. Mais pour moi, les Animals ont été - ils ont été une révélation. Les premiers disques avec une conscience sociale totale que j'avais jamais entendue. We Gotta Get Out Of This Place (14) avait ce super riff de basse, [il joue la ligne de basse de We Gotta Get Out Of This Place] et ça, c'était marquant, marquant pour l'époque.

[Il chante et joue à la guitare We Gotta Get Out Of This Place]:

In this dirty old part of the city / Dans ce vieux quartier sale de la ville
Where the sun refused to shine / Où le soleil refusait de briller
People tell me there ain't no sense in trying / Les gens disent qu'il est inutile d'essayer
My little girl, you're so young and pretty / Ma chérie, tu es si jeune et jolie
One thing I know is true / Il y a une chose que je sais
You'll be dead before your time is due, this I know / Tu seras morte avant que ton heure sonne, je le sais
See my Daddy in bed and dying / Regarde mon père au lit, en train de mourir
See his hair turning gray / Regarde ses cheveux qui deviennent gris
He's been working and slaving his life away, yes, I know / Il travaille et trime comme un esclave toute sa vie, oui je sais
It's been work every day / C'est du travail chaque jour
Just work every day / Rien que du travail chaque jour
It's been work, work, work, work / C'est du travail, travail, travail, travail
We gotta get out of this place / Nous devons nous tirer de cet endroit
If it's the last thing we ever do / Si c'est la dernière chose que nous devons jamais faire
We gotta get out of this place / Nous devons nous tirer de cet endroit
Girl, there's a better life for me and you / Il y a une meilleure vie à mener pour toi et moi
Yes, I know it's true / Oui, tu sais que c'est vrai


Il y a là chaque chanson que j'ai écrite. Oui. Toutes mes chansons sont là. Je ne plaisante pas, non plus. C'est Born To Run, Born In The USA, toutes les chansons que j'ai écrites ces 40 dernières années, y compris les toutes dernières. Mais elle m'a bouleversé si profondément. C'était la première fois où j'ai eu le sentiment d'entendre quelque chose qui venait de la radio et qui reflétait ma vie, mon enfance. Et l'autre chose qui était génial avec les Animals, c'était qu'aucun membre n'était beau. Aucun. On les a considérés comme l'un des groupes les plus laids de tout le rock'n'roll.

Et c'était une bonne chose. C'était une bonne chose pour moi, parce qu'à l'époque, je me trouvais affreux. Et, et ils n'étaient pas sympas, vous savez. Ils ne cherchaient pas à se faire bien voir. Ils étaient comme l'agression personnifiée. "It's my life. I'll do what I want / C'est ma vie. Je ferai ce que je veux" (15). Ils étaient cruels, ce qui était si libérateur. Tellement libérateur. Quand vous regardiez Eric Burdon - Eric Burdon ressemblait à votre papa, modèle réduit, avec une perruque. Il n'a jamais eu un visage d'enfant. Il a toujours eu le visage d'un petit homme.

De plus, il ne savait pas danser. Ils l'ont mis dans un costume, mais c'était comme si on avait mis un gorille dans un costume. On voyait bien qu'il se disait - Rien à foutre de cette merde, mec. Il n'en voulait pas, vous savez ? Et puis, il avait cette voix qui était, comment dire, comme Howlin' Wolf, ou quelque chose dans le genre qui sortait de la bouche d'un gosse de 17 ou 18 ans. Je ne sais pas comment s'est arrivé. Mais ils étaient si - J'ai trouvé leur cruauté si libératrice. Quel était ce vers terrible dans It's My Life ? "It's a hard world to get a break in, all the good things have been taken / C'est un monde dur pour obtenir quelque chose, toutes les bonnes choses ont été prises". Et puis "Though dressed in these rags I'll wear sable someday, hear what I say. I'm gonna ride the serpent. No more time spent sweating rent / Même si je porte des haillons, je porterai de la fourrure un jour, entendez ce que je dis. Je vais chevaucher ce serpent. Je ne passerai plus mon temps à suer pour payer mon loyer". Et puis ce vers magnifique, "It's my life. Show me I'm wrong, hurt me sometime. Hurt me sometime. But someday I'll treat you real fine / C'est ma vie. Montre-moi que j'ai tort, fais-moi du mal parfois. Mais un jour je te traiterai vraiment bien". J'adore. Oui, oui, oui, oui.

Et puis, il y avait leur nom - leur nom était très différent des Beatles ou d'Herman's Hermits, ou de Freddie & the Dreamers. Leur nom était impardonnable, et final et irrévocable. Vous le preniez en pleine face. Ce fut le nom le plus convaincant, jusqu'à l'arrivée des Sex Pistols.

Badlands, Prove It All Night - Darkness On The Edge Of Town était un album avec beaucoup de choses provenant des Animals. Les jeunes, écoutez bien. Je vais vous dire comment on fait, maintenant. J'ai pris Don't Let Me Be Misunderstood (16).

[Il chante et joue à la guitare l'introduction de Don't Let Me Be Misunderstood, puis chante la mélodie au piano et puis joue le riff de guitare de Badlands].

SXSW 2012 Keynote, 15 mars 2012
C'est ce même putain de riff, mec. Écoutez bien, les jeunes : voilà la recette d'un plagiat réussi. Et Darkness a été aussi influencé par l'explosion du punk à cette époque-là. Je suis allé acheter tous les disques - tous les premiers disques punk - et j'ai acheté Anarchy In The UK, et God Save The Queen et les Sex Pistols (17) étaient si terrifiants. Ils ont littéralement - ils ont ébranlé la terre. Ce qui est différent d'être choquant. Et beaucoup de groupes étaient choquants. Mais terrifiant, c'était autre chose. Il y avait, très, très peu de groupes rock qui étaient terrifiants. C'était une grande qualité, qui faisait partie de leur grande beauté.

Ils étaient courageux et ils vous défiaient, et ils vous rendaient courageux. Et beaucoup de cette énergie a trouvé son chemin dans le sous-texte de Darkness. Darkness a été écrit en 1977, et toute cette musique existait, et si vous aviez des oreilles, vous ne pouviez pas l'ignorer. J'ai connu des musiciens qui l'ont ignorée. Et ils se sont trompés. On ne pouvait pas ignorer ce défi, vous comprenez ?


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