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Au début, chaque musicien a sa période de genèse. Pour vous, il s'agissait peut-être des Sex Pistols, ou de Madonna, ou de Public Enemy. C’est tout ce qui, au départ, vous inspire pour agir. La mienne, c'était en 1956, Elvis (7) au Ed Sullivan Show (8). C’est ce soir-là que j’ai réalisé qu’un blanc pouvait être magique, que vous n’aviez pas besoin d’être limité par votre éducation, par votre physique ou par le contexte social qui vous oppressait. Vous pouviez faire appel à vos propres pouvoirs d’imagination, et vous pouviez créer votre propre identité transformative.
Un certain type d’identité transformative, qui à n’importe quel autre moment dans l’histoire américaine, aurait pu sembler difficile, si ce n’est impossible. Et je dis toujours à mes enfants qu’ils ont eu de la chance de naître à l’époque de la technologie reproductible. Sinon, ils voyageraient à l’arrière d’un chariot et je porterai un chapeau de bouffon. Tout est une question de synchronisation. Tout est une question de synchronisation. L’avènement de la télévision et sa dissémination de l’information visuelle ont changé la vie dans les années 50, de la même manière qu’Internet l’a fait au cours de ces vingt dernières années.
Souvenez-vous, il ne s'agissait pas seulement du physique d’Evis; il s'agissait de la façon dont il bougeait et qui rendait le public fou, furieux, qui les conduisaient à hurler leur extase, ou leur répulsion profane. C’était la télévision. Quand ils ont essayé de le censurer au-dessous de la taille, c’était parce que vous pouviez voir ce qui se passait dans son pantalon. Elvis était le premier homme moderne du XXème siècle, le précurseur de la révolution sexuelle, de la révolution des Droits Civiques, venu de la même ville de Memphis que Martin Luther King, et créant un art fondamental et étranger, qui serait entraîné par un courant dominant de la culture populaire.
La télévision et Elvis nous ont donné un accès total à un nouveau langage, à une nouvelle forme de communication, à une nouvelle façon d’être, une nouvelle façon de paraître, une nouvelle façon de penser le sexe, la race, l’identité, la vie; une nouvelle façon d’être américain, d'être un être humain, et une nouvelle façon d’entendre la musique. Une fois qu’Elvis a traversé les ondes, une fois qu’il a été entendu et vu en action, on ne pouvait plus remettre le génie dans sa bouteille. Après ce moment, il y a eu hier, et il y eu aujourd’hui, et il y avait un rockabilly incandescent qui forgeait un nouveau lendemain, juste sous vos yeux.
Un certain type d’identité transformative, qui à n’importe quel autre moment dans l’histoire américaine, aurait pu sembler difficile, si ce n’est impossible. Et je dis toujours à mes enfants qu’ils ont eu de la chance de naître à l’époque de la technologie reproductible. Sinon, ils voyageraient à l’arrière d’un chariot et je porterai un chapeau de bouffon. Tout est une question de synchronisation. Tout est une question de synchronisation. L’avènement de la télévision et sa dissémination de l’information visuelle ont changé la vie dans les années 50, de la même manière qu’Internet l’a fait au cours de ces vingt dernières années.
Souvenez-vous, il ne s'agissait pas seulement du physique d’Evis; il s'agissait de la façon dont il bougeait et qui rendait le public fou, furieux, qui les conduisaient à hurler leur extase, ou leur répulsion profane. C’était la télévision. Quand ils ont essayé de le censurer au-dessous de la taille, c’était parce que vous pouviez voir ce qui se passait dans son pantalon. Elvis était le premier homme moderne du XXème siècle, le précurseur de la révolution sexuelle, de la révolution des Droits Civiques, venu de la même ville de Memphis que Martin Luther King, et créant un art fondamental et étranger, qui serait entraîné par un courant dominant de la culture populaire.
La télévision et Elvis nous ont donné un accès total à un nouveau langage, à une nouvelle forme de communication, à une nouvelle façon d’être, une nouvelle façon de paraître, une nouvelle façon de penser le sexe, la race, l’identité, la vie; une nouvelle façon d’être américain, d'être un être humain, et une nouvelle façon d’entendre la musique. Une fois qu’Elvis a traversé les ondes, une fois qu’il a été entendu et vu en action, on ne pouvait plus remettre le génie dans sa bouteille. Après ce moment, il y a eu hier, et il y eu aujourd’hui, et il y avait un rockabilly incandescent qui forgeait un nouveau lendemain, juste sous vos yeux.
Alors, une semaine plus tard, inspiré par la passion contenue dans le pantalon d’Elvis, mes petits doigts de garçon de six ans s’enroulaient pour la première fois autour d’un manche de guitare, louée chez Mike Deal’s Music à Freehold, New Jersey. Ils n’étaient pas assez grands. L’échec avec un "E" majuscule. Je me suis alors acharné, et acharné, et acharné - devant le miroir, évidemment. Je continue toujours à m'acharner. Pas vous ? Allez, faut bien vérifier ses gestes !
Mais même avant qu'Elvis apparaisse, mon monde avait commencé à se façonner grâce à la petite radio, avec un simple haut-parleur de 30 cm, posée sur notre réfrigérateur. Ma mère aimait la musique, et elle nous a élevés en écoutant la musique pop à la radio. Entre 8h00 et 9h00 tous les matins, tout en saupoudrant de sucre mes Sugar Pops, les sons des premiers morceaux pop et doo-wop étaient chuchotés à mes oreilles juvéniles et impressionnables. Le doo-wop, la musique la plus sensuelle jamais produite, le son du sexe brut, des bas de soie frottant sur le tissu du siège arrière de la voiture, le bruit sourd des agrafes de soutiens-gorge à travers les États-Unis, des merveilleux mensonges murmurés dans des oreilles parfumées au Tabu, le son des traînées de rouge à lèvres, des chemises déboutonnées, des mascaras qui coulent, des larmes sur votre oreiller, des secrets murmurés dans le calme de la nuit, les gradins du lycée, et l’obscurité à la cantine du YMCA. La bande-son de votre incroyable et merveilleux retour chez vous, juste après avoir dansé, la démarche boitillante et les testicules échauffées. Oh ! et c’était si bon d'avoir mal...
A la fin des années 50 et au début des années 60, le doo-wop a commencé à ruisseler à la radio, dans les stations-services, les usines, les rues et les salles de billard - les temples de la vie et du mystère dans ma petite ville natale. Et j’étais toujours fasciné devant la progression basique des accords.
Il ne devrait pas y avoir une guitare par ici ? Quelqu’un en a une ?
[Il gratte la guitare et chante] Oooo whooo, Whooo, Whooo...
Vous n'avez pas envie d'embrasser quelqu'un ? Et puis, c'est devenu :
[Il gratte la guitare et chante les premiers vers de Backstreets]
One soft infested summer, me and Terry became friends... / Au cours d'un été ravagé par la douceur, Terry et moi sommes devenus amis...
Tout vient du même endroit.
Mais même avant qu'Elvis apparaisse, mon monde avait commencé à se façonner grâce à la petite radio, avec un simple haut-parleur de 30 cm, posée sur notre réfrigérateur. Ma mère aimait la musique, et elle nous a élevés en écoutant la musique pop à la radio. Entre 8h00 et 9h00 tous les matins, tout en saupoudrant de sucre mes Sugar Pops, les sons des premiers morceaux pop et doo-wop étaient chuchotés à mes oreilles juvéniles et impressionnables. Le doo-wop, la musique la plus sensuelle jamais produite, le son du sexe brut, des bas de soie frottant sur le tissu du siège arrière de la voiture, le bruit sourd des agrafes de soutiens-gorge à travers les États-Unis, des merveilleux mensonges murmurés dans des oreilles parfumées au Tabu, le son des traînées de rouge à lèvres, des chemises déboutonnées, des mascaras qui coulent, des larmes sur votre oreiller, des secrets murmurés dans le calme de la nuit, les gradins du lycée, et l’obscurité à la cantine du YMCA. La bande-son de votre incroyable et merveilleux retour chez vous, juste après avoir dansé, la démarche boitillante et les testicules échauffées. Oh ! et c’était si bon d'avoir mal...
A la fin des années 50 et au début des années 60, le doo-wop a commencé à ruisseler à la radio, dans les stations-services, les usines, les rues et les salles de billard - les temples de la vie et du mystère dans ma petite ville natale. Et j’étais toujours fasciné devant la progression basique des accords.
Il ne devrait pas y avoir une guitare par ici ? Quelqu’un en a une ?
[Il gratte la guitare et chante] Oooo whooo, Whooo, Whooo...
Vous n'avez pas envie d'embrasser quelqu'un ? Et puis, c'est devenu :
[Il gratte la guitare et chante les premiers vers de Backstreets]
One soft infested summer, me and Terry became friends... / Au cours d'un été ravagé par la douceur, Terry et moi sommes devenus amis...
Tout vient du même endroit.
En tout cas, dans mes oreilles de garçon de 13 ans, la pop des années 60 est arrivée. Roy Orbison (9) - en plus de Johnny Cash - c'était l’autre Homme en Noir. Il était le véritable maître de l’apocalypse romantique que vous redoutiez, et dont vous saviez qu'il allait arriver, après la première nuit où vous avez murmuré "Je t’aime" à votre nouvelle petite amie. Vous déprimiez. Roy était le plus cool des perdants que vous ayez jamais vus. Avec ses lunettes noires en forme de bouteilles de Coca, sa tessiture à trois octaves, il semblait se réjouir de planter son couteau au plus profond des entrailles de vos insécurités d’adolescent.
Rien que les titres : Crying [Pleurer], It’s Over [C'est fini], Running Scared [Prendre peur]. C’est vrai. La paranoïa, oh, la paranoïa. Il chantait l’impossibilité tragique de connaître les femmes. Il était torturé par la peau douce, les pulls en angora, la beauté et la mort - tout comme vous. Mais il chantait aussi sur les hauteurs d’une béatitude presque indicible, qu'il avait atteint, grâce à ces mêmes choses qui le torturaient. Oh, ironie cruelle...
Et pour ces quelques instants, il vous disait que les dégâts, et les ruines et les cœurs brisés en valaient la peine. J’ai compris, mes jeunes auteurs. La sagesse m’a dit : La vie est une tragédie, rompue par des moments d’extase naïve qui rendent cette tragédie supportable. J’avais à moitié raison. Ce n’était pas la vie, c’était la pop music. Mais à 24 ans, qui connaissait la différence ?
Rien que les titres : Crying [Pleurer], It’s Over [C'est fini], Running Scared [Prendre peur]. C’est vrai. La paranoïa, oh, la paranoïa. Il chantait l’impossibilité tragique de connaître les femmes. Il était torturé par la peau douce, les pulls en angora, la beauté et la mort - tout comme vous. Mais il chantait aussi sur les hauteurs d’une béatitude presque indicible, qu'il avait atteint, grâce à ces mêmes choses qui le torturaient. Oh, ironie cruelle...
Et pour ces quelques instants, il vous disait que les dégâts, et les ruines et les cœurs brisés en valaient la peine. J’ai compris, mes jeunes auteurs. La sagesse m’a dit : La vie est une tragédie, rompue par des moments d’extase naïve qui rendent cette tragédie supportable. J’avais à moitié raison. Ce n’était pas la vie, c’était la pop music. Mais à 24 ans, qui connaissait la différence ?
J’étais donc en route. Et puis Spector et le Mur du Son (10). L’oeuvre entière de Phil pouvait être décrite par le titre d’une de ses productions les moins connues, He Hit Me (And I Felt Like A Kiss) [Il m'a frappé (Et j'ai senti comme un baiser)] (11). Les disques de Phil ressemblaient presque au chaos, à de la violence enrobée de sucre et de bonbons, chantés par des filles qui envoyaient directement Roy prendre des anti-dépresseurs. Si Roy était un opéra, Phil représentait les symphonies, des petits orgasmes de trois minutes, suivis par l’oubli.
Et la plus grande leçon de Phil, c'était le son, le son, le son est son propre langage. La première chose à laquelle vous pensez avec Phil Spector, c’est [il imite le son de batterie du début de Be My Baby]. Il ne vous fallait rien de plus.
Et la plus grande leçon de Phil, c'était le son, le son, le son est son propre langage. La première chose à laquelle vous pensez avec Phil Spector, c’est [il imite le son de batterie du début de Be My Baby]. Il ne vous fallait rien de plus.