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Episode 3 - Amazing Grace : Musique Américaine

Renegades : Born In The U.S.A.



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BRUCE SPRINGSTEEN: Tu es donc à Hawaï, tu es adolescent... C'était quoi ? Les années 70 ?

POTUS BARACK OBAMA: Les années 70. Les années 70.

BRUCE SPRINGSTEEN: Tu es adolescent dans les années 70. Quelle est la musique qui attire ton oreille quand tu commences à t'y intéresser. Aux alentours des 14 ans, je suppose ?

[Bruce gratte la guitare]

POTUS BARACK OBAMA: Le premier album que j'ai acheté avec mon propre argent – Talking Book, Stevie Wonder. Je m'asseyais devant un petit électrophone en plastique, vieux et amochée.

BRUCE SPRINGSTEEN: Évidemment, oui.

POTUS BARACK OBAMA: J'avais des écouteurs pour que mes grands-parents ne se plaignent pas.

BRUCE SPRINGSTEEN: D'accord.

POTUS BARACK OBAMA: Et je chantais chaque chanson en chœur avec Stevie Wonder pendant des heures.

[Stevie Wonder - You Are the Sunshine of My Life commence : « I feel like this is the beginning... though I’ve loved you for a million years...»]

POTUS BARACK OBAMA: Il y avait le Top 40 à Hawaï. Casey Kasem animait l'émission (1).

[Extrait d'archive radio du Top 40 Américain - Lou Reed – Walk On The Wild Side - « Chaque semaine à la même heure sur le Top 40 Américain. Mon nom est Casey Kasem, et le compte à rebours continue et ne s'arrêtera pas jusqu'au numéro un... »]

POTUS BARACK OBAMA: Je dois avoir... J'ai 10, 11 ans. J'écoute la radio, et il y a des chansons auxquelles je finis par vraiment m'attacher.

[Extrait d'archive radio - Marvin Gaye - Let’s Get it On : « Let’s get it on... Let's love baby… »]

Tu sais, tu as un garçon de 10 ans qui répète, [Il chante] Let’s get it on... [Il chante]

[Marvin Gaye - Let’s Get it On : « Let’s get it on… »]

BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]

POTUS BARACK OBAMA: [Il chante] Ahhhh baby !

[Marvin Gaye - Let’s Get it On : « Sugah… »]

BRUCE SPRINGSTEEN: [il chante] We're all sen...

ENSEMBLE: [ils chantent] ...sensitive people...

POTUS BARACK OBAMA: [il chante] ...with so much to give... Et tu sais que ta grand-mère écoute, et elle me dit, « Quoi, qu'est-ce que tu chantes ? »

BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]

[Extrait d'archive radio - Billy Paul - Me and Mrs. Jones : « Meeeeeee annnnd…]

POTUS BARACK OBAMA: Il y avait une autre chanson de Billy Paul.

[Billy Paul - Me and Mrs. Jones : Mrs…. Mr. Jones…]

POTUS BARACK OBAMA: Me and Mrs. Jones.

BRUCE SPRINGSTEEN: Enooooooorme. [Il chante] I don’t know how it went...

POTUS BARACK OBAMA: [Il chante] Mrs. Jones, Mrs. Jones, Mrs. Jones

BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]

POTUS BARACK OBAMA: [il chante] We both know that is wrong, but it's much too strong. [Il chante]

BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]

POTUS BARACK OBAMA: [rires] A 11 ans.

BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]

[Joni Mitchell - Help Me commence]

POTUS BARACK OBAMA: Et Joni Mitchell arrive avec Court and Spark.

BRUCE SPRINGSTEEN: Grand disque.

POTUS BARACK OBAMA: Je devais avoir 11, 12 ans.

BRUCE SPRINGSTEEN: Magnifique album, oui.

[Joni Mitchell - Help Me : « Help me, I think I’m falling...]

POTUS BARACK OBAMA: [Il chante] Help me, I... [Il chante]

ENSEMBLE: [Ils chantent] I think I'm falling in love with you [Ils chantent]

[Joni Mitchell - Help Me : «... Are you gonna let me go there by myself ? That's such a lonely thing to dooooo... ]

POTUS BARACK OBAMA: Oui. C'est joli... Je ne sais pas à quoi correspond ce sentiment, mais il semble fascinant.

BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]

[Joni Mitchell - Help Me s'estompe: « Both of us flirtin' around... Flirtin' and flirtin', hurtin' too. We love our lovin' (lovin')... ]

POTUS BARACK OBAMA: Ce qui était intéressant, c'est que nous avions le Top 40.

[Earth, Wind and Fire - Fantasy commence]

POTUS BARACK OBAMA: Et tu avais tous ces artistes qui mélangeaient les styles comme Earth, Wind & Fire.

POTUS BARACK OBAMA: Et puis, il y avait d'autres styles de musique, qui étaient beaucoup plus – je ne parlerais pas de ségrégation - mais plutôt identifiables comme franchement noir ou blanc.

[Earth, Wind and Fire - Fantasy s'estompe]

[Ohio Players - Love Rollercoaster commence : « Rollercoaster of love… Say what ? Rollercoaster… (oohh oohh oohh)]

POTUS BARACK OBAMA: Par exemple, j'aimais les Ohio Players ou Parliament. Ce n'était pas des disques que tu pouvais trouver chez certains de mes amis blancs. Certains d'entre eux écoutaient plutôt du Heavy Metal, et si je montais en voiture avec eux...

[Ozzy Osbourne - Crazy Train commence]

POTUS BARACK OBAMA: ...ils mettaient ce truc à fond pendant tout le trajet, et c'était un peu pénible pour moi.

[Ozzy Osbourne - Crazy Train]

POTUS BARACK OBAMA: Donc, bien que le Top 40 pratiquait la déségrégation, à Hawaï en tout cas, tu avais toujours ces distinctions entre les styles de musique qui étaient écoutés.

[Parliament - Give Up the Funk (Tear the Roof Off the Sucker) commence : « Oww, we want the funk, give up the funk! Oww, we need the funk, we gotta have the funk! La la la la la Doo doo doo doo doo doo doo oww...]

POTUS BARACK OBAMA: En seconde, au lycée, je m'éloigne de ce qui se passe à la radio et je me mets à prendre des tangentes. Je me mets au Rock et je commence à écouter Dylan, les Stones, et The Last Waltz de Martin Scorsese sort à cette période (2). Je regarde The Band et tous les artistes qu'on voit dans le film, qui montre les différentes branches du Folk, de la Soul, du R&B et de la Country, et comment ces diverses influences se combinent pour former le Rock'n'roll. Je commence à suivre tous ces courants, ruisseaux et rivières. C'est aussi à cette époque-là que je me mets à écouter du Jazz. Petit, mon père m'avait amené à un concert de Jazz, mais je n'avais pas accroché sur le coup. Donc au début, j'écoutais du pop-jazz - appelé smooth-jazz aujourd'hui. George Benson. Il a fait cette grande reprise, Oh Broadway.

BRUCE SPRINGSTEEN: Un disque énorme.

POTUS BARACK OBAMA: Il y avait cette chanson de Groover Washington Jr, Mister Magic. Et puis, à l'université, j'ai eu une grande période Bob Marley. C'est à ce moment-là que je commence vraiment à m'intéresser au Jazz. Kind Of Blue de Miles Davis, My Favorite Things de John Coltrane, Mingus. Aujourd'hui, j'écoute certainement plus de hip-hop, grâce à mes filles. C'est ce qui passe le plus souvent à la maison.

BRUCE SPRINGSTEEN: Mes fils, c'était autre chose. Mon fils aîné aimait le Punk politique : Against Me!, Tom Morello, Rise Against. Mon plus jeune fils était plutôt Rock classique - Creedance Clearwater et les premiers disques acoustiques de Bob Dylan. Ma fille était branchée Top 40. Donc, tout ce qui était classé au Top 40 pendant la décennie où je l'ai conduite ici et là en voiture, j'y ai eu droit.

POTUS BARACK OBAMA: C'est une formidable aubaine d'avoir des enfants qui te maintiennent sur les rails. Parce que c'est dans les deux sens : c'est grâce à ça que mes filles vont avoir envie d'écouter un album de Marvin Gaye, par exemple. Il fait partie de leur souvenir d'enfance, quand elles écoutaient nos disques.

BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.

POTUS BARACK OBAMA: Quand tu as décidé que tu allais devenir une rockstar...

BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]

POTUS BARACK OBAMA: ...à l'âge de 15 ans...

BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.

POTUS BARACK OBAMA: Ou dans ces eaux-là.

[Bruce gratte la guitare]

POTUS BARACK OBAMA: Il était logique de jouer de la guitare ?

BRUCE SPRINGSTEEN: Les guitares n’étaient pas chères. C'était donc plus facile. Ma première guitare a coûté 18$.

POTUS BARACK OBAMA: Moins cher qu'un piano.

BRUCE SPRINGSTEEN: Beaucoup moins cher qu'un piano, beaucoup moins cher qu'une batterie.

POTUS BARACK OBAMA: C'est vrai ? La batterie coûtait plus chère.

BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Je pouvais travailler, donc c'est ce que j'ai fait. Je repeignais les maisons, goudronnais les toits, je tondais les pelouses, j'ai économisé 18$, et j'ai acheté une guitare bon marché chez Western Auto Store, à Freehold, NJ. Mon cousin Frankie avait... Il commençait un peu à jouer de la guitare et il m'a appris quelques accords et je suis rentré chez moi avec un livre de Folk, avec toutes les partitions. Donc, pendant un mois ou deux, je grattais ma guitare avec des classiques de la Folk. Tu sais, Greensleeves et If I Had A Hammer. Et quelques temps après, on m'a appris Honky Tonk.

[Bruce joue Honky Tonk à la guitare]

Honky Tonk, c'est ça.

[Bruce joue Honky Tonk à la guitare et Potus frappe ses mains sur ses genoux]

BRUCE SPRINGSTEEN: Puis, j'ai commencé à apprendre des morceaux des Beatles. J'ai appris Twist & Shout.

[Bruce joue Twist & Shout à la guitare]

Tu vois... [Il chante] Shake it on baby ! [Il chante]

Et tu sais, j'ai commencé à fermer la porte de ma chambre, à me mettre debout devant la glace.

POTUS BARACK OBAMA: Tu t’entraînais.

BRUCE SPRINGSTEEN: Juste pour crier et gratter ma guitare devant le miroir.

POTUS BARACK OBAMA: Tes parents disaient quelque chose ? Ils disaient quoi ? Pourquoi tu cries ?

BRUCE SPRINGSTEEN: Baisse le son ! Le truc habituel, tu vois.

POTUS BARACK OBAMA: Baisse le son... [rires]

BRUCE SPRINGSTEEN: Baisse le son, enfin ! Baisse le son ! Ma mère m'encourageait. Mon père, il était plutôt du genre, « Qu'est-ce qui se passe là encore ? Je ne sais pas ce que fait ce gosse, je ne comprends pas », tu vois ?

[Bruce pince une corde de guitare]

Et puis j'ai laissé pousser mes cheveux et là, il n'a vraiment pas compris et... Mais c'était la même chose pour des milliers, si ce n'est des millions d'autres gamins, exactement au même moment, exactement de la même façon. Le miracle, c'est donc qu'il y a des millions de gamins qui prennent la guitare.

[Des cordes de guitare sont pincées]

Un certain nombre de ces gamins apprennent à plaquer quelques accords. Un certain nombre de ces gamins apprennent à jouer, à jouer quelques chansons.

[Des accords sont joués à la guitare]

Peu d'entre eux joueront dans un petit groupe du coin.

[Extrait d'archive de concert de Bruce Springsteen en ‘72 - Growin’ Up : « Voici la première chanson, que j'aimerais jouer »...]

Parmi ceux qui jouent dans un petit groupe du coin, peu feront une maquette.

[Extrait d'archive de concert de Bruce Springsteen en ‘72 - Growin’ Up : « Une chanson qui parle de grandir »...]

Et parmi ceux qui jouent dans un petit groupe du coin, peu feront un album.

[Extrait d'archive de concert de Bruce Springsteen en ‘72 - Growin’ Up : « Well I stood stone-like at midnight »...]

Et puis quelques-uns de ces gamins, qui jouent dans un groupe du coin, font un album qui se vend à quelques exemplaires.

[Extrait d'archive de concert de Bruce Springsteen en ‘72 - Growin’ Up : « I combed my hair 'til it was just right. And commanded the night brigade »...]

Et puis parmi ceux qui font un disque, et jouent dans un groupe, peu feront une petite carrière. Et encore moins que ceux qui ont cette chance, et qui ont un groupe, peu gagneront régulièrement leur vie.

[Extrait d'archive de concert de Bruce Springsteen en ‘06 - Growin’ Up : « Ooh, ooh, growin' up »...]

Et puis, un soir, je suis sur la scène du Rock N’ Roll Hall of Fame (3), et je chante Something, entre George Harrison et Mick Jagger. Et je me dis, « Ok ? Un de ces gamins [rires] se tient ce soir sur scène entre George Harrison et Mick Jagger » [rires]

ENSEMBLE: [rires]

BRUCE SPRINGSTEEN: Pour moi, choisir la musique, c'était à la fois simple et compliqué. Premièrement, il s'agissait de la seule et unique chose que je désirais faire. Deuxièmement, c'était un élément essentiel dans la construction de mon identité en tant qu'homme, en tant qu'Américain, en tant qu'être humain. Quand je tiens une guitare, je n'ai pas l'impression de tenir quoi que ce soit. C'est juste une partie de mon corps, tu comprends. C'est un autre membre. Quand je porte ma guitare en bandoulière, j'ai la sensation d'être dans mon élément naturel. Et j'ai aussi construit une philosophie de la scène : Je vais donner le meilleur de moi-même pour faire ressortir le meilleur de ce qu'il y a en toi. Et quand tu rentreras chez toi, je veux que tu puisses avoir le sentiment d'appartenir à une communauté, de disposer d'un ensemble de valeurs sur lesquelles tu pourras t'appuyer après le concert. Tu sais, je raconte toujours cette blague. « Je veux monter sur scène et changer ta vie ». Sauf que ce n'est pas une blague. C'est ma raison d'être un soir de concert.

POTUS BARACK OBAMA: C'est ton sacerdoce.

[Extrait d'archive de concert de Bruce Springsteen en ‘00 - Light of Day : « Avec le pouvoir ! Et le gloire ! Avec le pouvoir ! Et le gloire ! Avec la promesse ! Avec la majesté ! Avec le mystère ! Avec le ministère du rock n’ roll! »...]

BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Quand je monte sur scène, je suis persuadé de pouvoir t'inspirer par mon dur labeur, par le développement d'une philosophie, et par une certaine dimension spirituelle. Persuadé de pouvoir t'encourager à développer ces choses-là en toi. Et si je peux y apporter ma modeste contribution, j'aurai fait mon travail - en plus de te faire danser.

POTUS BARACK OBAMA: Tu veux aussi que le public passe un bon moment.

BRUCE SPRINGSTEEN: Je suis un amuseur. Je veux que tu rigoles. Je veux que tu t'amuses.

POTUS BARACK OBAMA: Pendant un moment, tu oublies tes ennuis...

BRUCE SPRINGSTEEN: Et si tu dois ne retenir que ça, c'est déjà beaucoup.

POTUS BARACK OBAMA: C'était ton objectif dès le départ ? Je veux dire, quand tu jouais avec ton groupe dans les petits bars et les clubs, tu te disais juste, « je veux que ça se passe bien sur scène, et que le public quitte la salle en se disant, "Hé, il assure ce groupe" »

BRUCE SPRINGSTEEN: Je veux que ça se passe bien sur scène. Je veux gagner mes cinq dollars. Je veux que le public se dise que nous sommes bons - mais au fur et à mesure, je veux qu'il se dise que nous sommes les meilleurs. Je veux transmettre une joie brute et une envie vorace de croquer la vie.

POTUS BARACK OBAMA: A quel moment tu te mets à raisonner en ces termes-là ? Au moment où le public devient plus nombreux et que tu sens une plus grande responsabilité vis-à-vis de lui ?

BRUCE SPRINGSTEEN: Je commence bien avant d'y penser véritablement. Cette prise de conscience viendra beaucoup plus tard, lorsque je me mettrai à adopter un point de vue philosophique, ce qui est dans ma nature en tant qu'être humain. Je voulais avoir un code. Je pense que chacun a un code, en vertu duquel il mène sa vie. Et ce code nous guide, nous protège, nous délivre...

POTUS BARACK OBAMA: Et on culpabilise lorsqu'on ne le respecte pas.

BRUCE SPRINGSTEEN: C'est vrai. Tous mes héros, à commencer par ceux du Western, semblent avoir un code de vie. J'ai pris mon travail au sérieux. Je pense exercer une profession ridicule, mais noble. La musique a eu un impact sur moi, a changé ma vie, et a fait de moi ce que je suis devenu. Dieu m'a donné la possibilité de monter sur scène le soir et d'avoir ce même impact sur certains dans le public.

[Le synthétiseur joue]

Si je peux le faire, être sur terre en vaut la peine. Tu sais, c'est quelque chose qui vaut la peine d'être vécu.

[Le synthétiseur joue]

[PAUSE]


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