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Alors que les séances progressaient, et qu’ils commençaient à se sentir chez eux dans les studios de Southern Tracks Recording à Atlanta, Springsteen s’est rendu compte qu’il n’avait pas réellement besoin de s’inquiéter. Les chansons qu’il écrivait arrivaient avec leurs propres instructions sur la manière d’être jouées et arrangées. Dans cette étrange atmosphère de traumatisme et de désorientation post-11 septembre, il s’est quasiment retrouvé comme le destinataire de messages provenant de son propre subconscient ou des perturbations de l’éther collectif.
“Je pense que dès la seconde ou la troisième semaine de septembre, j’avais écrit Into The Fire pour un téléthon (America: A Tribute To Heroes), organisé ici aux États-Unis, après le 11 septembre, et j’allais la chanter pour ce téléthon, mais à la place, j’ai chanté une chanson qui s’appelle My City Of Ruins. Puis, j’ai écrit You’re Missing, et après, je me suis réveillé une nuit et j’avais cette chanson, The Fuse et alors tout à coup, vous avez des éléments de l’histoire que vous êtes obligé de raconter à un moment donné. Que l’on vous demande de raconter, en quelque sorte. Puis, vous la regardez, et vous l’écoutez, et elle commence à dire, vous savez, qu’il y a simplement une large gamme d’éléments affectifs qui font que la chanson est profonde et achevée, et les chansons se présentent d’elles-mêmes, en quelque sorte, et de cette manière''.
“Ce n’est pas nécessairement linéaire et ce n’est pas nécessairement directement littéral - en fait, on espère que ce ne sera pas réellement littéral. C’était quelque chose que j’essayais de ne pas faire. Je voulais me sentir dans ce contexte émotionnellement, mais pas de manière directement littérale, même si sur quelques chansons j’allais être plus littéral que sur d’autres. D’une certaine façon, ces chansons ont ancré le thème du disque, ainsi lorsque vous passez aux autres, vous commencez à les étudier et à vérifier les couplets et vous réalisez que c’est une partie d'un tout. C'est ainsi que ça s'est plutôt développé, très instinctivement. Ce n’est pas une chose sur laquelle j’ai beaucoup cogité".
“Je pense que dès la seconde ou la troisième semaine de septembre, j’avais écrit Into The Fire pour un téléthon (America: A Tribute To Heroes), organisé ici aux États-Unis, après le 11 septembre, et j’allais la chanter pour ce téléthon, mais à la place, j’ai chanté une chanson qui s’appelle My City Of Ruins. Puis, j’ai écrit You’re Missing, et après, je me suis réveillé une nuit et j’avais cette chanson, The Fuse et alors tout à coup, vous avez des éléments de l’histoire que vous êtes obligé de raconter à un moment donné. Que l’on vous demande de raconter, en quelque sorte. Puis, vous la regardez, et vous l’écoutez, et elle commence à dire, vous savez, qu’il y a simplement une large gamme d’éléments affectifs qui font que la chanson est profonde et achevée, et les chansons se présentent d’elles-mêmes, en quelque sorte, et de cette manière''.
“Ce n’est pas nécessairement linéaire et ce n’est pas nécessairement directement littéral - en fait, on espère que ce ne sera pas réellement littéral. C’était quelque chose que j’essayais de ne pas faire. Je voulais me sentir dans ce contexte émotionnellement, mais pas de manière directement littérale, même si sur quelques chansons j’allais être plus littéral que sur d’autres. D’une certaine façon, ces chansons ont ancré le thème du disque, ainsi lorsque vous passez aux autres, vous commencez à les étudier et à vérifier les couplets et vous réalisez que c’est une partie d'un tout. C'est ainsi que ça s'est plutôt développé, très instinctivement. Ce n’est pas une chose sur laquelle j’ai beaucoup cogité".
En d’autres termes, c’était l’opposé des chansons de l’album The Ghost of Tom Joad, qui étaient des longues narrations évolutives, assemblées avec minutie, à partir de détails infimes et d’une étude de caractères d’une grande précision. La seule chanson, parmi les nouvelles, vaguement de cette veine est Nothing Man, visiblement le tableau d’un personnage d’une petite ville qui devient un héros local après un acte d’héroïsme non précisé.
“C’est vrai, et celle-là je l’ai écrite en 1994'', dit Springsteen en hochant la tête. ''Cet album est diamétralement opposé en ce qui concerne les paroles. Il y a des détails, mais c’était une forme d’écriture différente de ce que j’ai fait depuis un bon moment. C’était simplement une écriture de chansons rock ou une écriture de chansons pop, vous voyez ? J’essayais de trouver un moyen de raconter une histoire dans ce contexte. Une des choses que j’ai apprises lors de quelques-uns de mes premiers albums où j’essayais d’enregistrer le groupe… Par exemple sur Nebraska, dès que le groupe jouait ces chansons, il supplantait les paroles. Ça ne fonctionnait pas. Ces deux formes n’allaient pas ensemble. Le groupe arrive et, généralement, fait du bruit, et les paroles exigeaient du silence, vous comprenez ? Ils font des arrangements, et les paroles exigeaient moins d’arrangements. Les paroles voulaient être au centre, et il y avait une quantité minimale de musique. La musique était absolument nécessaire, mais il fallait qu’elle soit minimale, et donc avec The Rising, j’essayais de faire un disque excitant avec le E Street Band comme je n’en avais pas fait depuis longtemps, alors cette forme m’a guidé en quelque sorte''.
“C’est vrai, et celle-là je l’ai écrite en 1994'', dit Springsteen en hochant la tête. ''Cet album est diamétralement opposé en ce qui concerne les paroles. Il y a des détails, mais c’était une forme d’écriture différente de ce que j’ai fait depuis un bon moment. C’était simplement une écriture de chansons rock ou une écriture de chansons pop, vous voyez ? J’essayais de trouver un moyen de raconter une histoire dans ce contexte. Une des choses que j’ai apprises lors de quelques-uns de mes premiers albums où j’essayais d’enregistrer le groupe… Par exemple sur Nebraska, dès que le groupe jouait ces chansons, il supplantait les paroles. Ça ne fonctionnait pas. Ces deux formes n’allaient pas ensemble. Le groupe arrive et, généralement, fait du bruit, et les paroles exigeaient du silence, vous comprenez ? Ils font des arrangements, et les paroles exigeaient moins d’arrangements. Les paroles voulaient être au centre, et il y avait une quantité minimale de musique. La musique était absolument nécessaire, mais il fallait qu’elle soit minimale, et donc avec The Rising, j’essayais de faire un disque excitant avec le E Street Band comme je n’en avais pas fait depuis longtemps, alors cette forme m’a guidé en quelque sorte''.
Avec la présence rassurante d’O’Brien dans la cabine de contrôle, Springsteen s’est senti capable de se concentrer sur l’écriture et l’interprétation. "Brendan avait ce point de vue esthétique indéniable et particulier quand il dit: 'Ouais. Je trouve que ça fonctionne là-dessus, mais ça le fait résonner comme ça', vous voyez ? Nous étions dans une situation où je faisais intensément confiance à son point de vue, et j’avais une grande foi dans la direction qu’il pensait que l’album allait prendre, côté son".
“On a mis les guitares devant, on a mis les claviers à un endroit différent, les choses avaient un son légèrement différent. Nous avons utilisé une variété de boucles et nous avons utilisé beaucoup de sons trouvés différemment - tout ça, pour en quelque sorte, ne pas faire le truc normal que nous avions enregistré par le passé. L’essentiel était que le groupe se sente frais au niveau du son. Il (O’Brien) savait exactement ce qu’il fallait faire, alors je me suis mis en retrait d’une certaine manière et j’ai chanté, joué et écrit les chansons".
“On a mis les guitares devant, on a mis les claviers à un endroit différent, les choses avaient un son légèrement différent. Nous avons utilisé une variété de boucles et nous avons utilisé beaucoup de sons trouvés différemment - tout ça, pour en quelque sorte, ne pas faire le truc normal que nous avions enregistré par le passé. L’essentiel était que le groupe se sente frais au niveau du son. Il (O’Brien) savait exactement ce qu’il fallait faire, alors je me suis mis en retrait d’une certaine manière et j’ai chanté, joué et écrit les chansons".
Bien que parfois Springsteen ait vu sa musique être revendiquée par des hommes politiques des deux bords - Ronald Reagan et son rival démocrate Walter Mondale ont tous les deux essayé de récupérer une partie de son Born In The USA en 1984 - il s’est résolument attaché à l’aspect personnel et particulier. A cette occasion, Springsteen a pris soin de se maintenir, ainsi que son travail, à distance des deux candidats. Dix-huit ans plus tard, il ne se sent pas plus enclin à s’engager politiquement, et au début de cette année il a repoussé les efforts d’un groupe activiste appelé Indépendance pour le New Jersey pour mettre son nom en avant comme candidat au Sénat Américain. Il a cité le général William Tecomseh Sherman, qui refusa la présidence en 1884. "Si je suis désigné, je ne me présenterai pas" a déclaré le Boss en plaisantant. "Si je suis élu, je ne ferai pas mon mandat".
Donc, ses nouvelles chansons parlent d’émotions individuelles et de sujets spirituels, plutôt que de la politique étrangère américaine ou de la désastreuse incompétence du FBI. De plus, il est bien conscient que rien ne se démode plus vite qu’un album prenant forme dans les décombres des informations de la veille. Cependant, il a fait un geste explicite pour regarder bien au-delà des États-Unis avec Worlds Apart, une chanson au goût oriental prononcé grâce à la participation du musicien Pakistanais qawwali Asif Ali Khan et de son groupe. Sous la supervision de Chuck Plotkin, ils ont enregistré leur contribution dans un studio de Los Angeles, relié aux séances d’enregistrement en Géorgie grâce à un lien RNIS (Réseau Numérique à Intégration de Services, ndt).
Donc, ses nouvelles chansons parlent d’émotions individuelles et de sujets spirituels, plutôt que de la politique étrangère américaine ou de la désastreuse incompétence du FBI. De plus, il est bien conscient que rien ne se démode plus vite qu’un album prenant forme dans les décombres des informations de la veille. Cependant, il a fait un geste explicite pour regarder bien au-delà des États-Unis avec Worlds Apart, une chanson au goût oriental prononcé grâce à la participation du musicien Pakistanais qawwali Asif Ali Khan et de son groupe. Sous la supervision de Chuck Plotkin, ils ont enregistré leur contribution dans un studio de Los Angeles, relié aux séances d’enregistrement en Géorgie grâce à un lien RNIS (Réseau Numérique à Intégration de Services, ndt).
“J’avais écrit Worlds Apart et j’ai commencé à m’amuser avec des gammes Moyen-Orientales sur certaines parties en fond", explique Springsteen. "Il se trouvait qu’Asif Ali Khan était en train de faire un disque chez Def Jam (Def Jam Recordings est un label de musique hip-hop, ndt) et ils étaient à Los Angeles. Par la connexion RNIS, nous avons pu avoir une séance d’enregistrement d’un côté du pays à l’autre, et ils ont joué et chanté magnifiquement bien. C’était très excitant d’entendre ce son au milieu d’une chanson de rock. J’essayais de regarder en dehors des États-Unis et de déplacer les frontières du disque d’une certaine façon. Je pense que cette chanson est née lorsque j’ai vu une photo des femmes en Afghanistan, dévoilées, quelques jours après que les Talibans ont été chassés de Kaboul et leurs visages étaient si beaux".
Ne craint-il pas que des commentateurs va-t-en-guerre puissent l’accuser de réconforter l’ennemi ?
"N’importe qui peut dire n’importe quoi", dit-il en faisant un geste de dédain. "Je ne sais pas, rien ne me surprend à ce stade. Les gens interprètent les choses de plein de manières différentes - c’étaient simplement de grands musiciens pakistanais et ils chantaient superbement. Qui sait ? Comme vous dites, les gens réagissent aux choses de toutes les manières possibles, mais je pense que si quelqu’un l’écoute, le résultat est vraiment très bon d’un point de vue musical et c’étaient des gens formidables et des musiciens formidables".
Ne craint-il pas que des commentateurs va-t-en-guerre puissent l’accuser de réconforter l’ennemi ?
"N’importe qui peut dire n’importe quoi", dit-il en faisant un geste de dédain. "Je ne sais pas, rien ne me surprend à ce stade. Les gens interprètent les choses de plein de manières différentes - c’étaient simplement de grands musiciens pakistanais et ils chantaient superbement. Qui sait ? Comme vous dites, les gens réagissent aux choses de toutes les manières possibles, mais je pense que si quelqu’un l’écoute, le résultat est vraiment très bon d’un point de vue musical et c’étaient des gens formidables et des musiciens formidables".