Bruce Springsteen
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Variety, octobre 2017

Sur la Côte avec Bruce



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Dans le livre, vous dites qu'après la tournée The River en 1981, vous avez gagné assez d'argent, vous étiez "arrivés". Puis vous avez enregistré Nebraska, votre album le plus sombre. Pourquoi ?

Je ne sais pas... vous devez réfléchir à postériori aux éléments psychologiques qui vous ont conduit à tapoter une veine créatrice particulière à un moment donné. En y réfléchissant, je m'intéressais alors à cette sorte d'écriture gothique américaine. Flannery O'Connor a eu une grande influence sur moi, le film Badlands [1973] de Terrence Malick, le film True Confessions [1981] avec Robert De Niro et Robert Duvall, qui n'a pas retenu l'attention, mais que j'aimais vraiment. Et puis, les écrivains de roman noir que j'ai déjà beaucoup mentionné par le passé, James M. Cain et Jim Thompson. Je voulais écrire quelque chose qui ressemble à ces films et à ces histoires, mais qui se connecte aussi aux souvenirs les plus anciens que j'avais de ma vie entre, disons, le moment où je suis né, et mes 13 ou 14 ans, dans une petite ville entouré par ma famille, une famille irlandaise de l'ancien monde, et une famille italienne de la première – ou de la deuxième génération. J'ai toujours pensé que Nebraska parlait de mon enfance à cette époque-là, et parlait de ce que ça faisait de grandir ici au milieu des années 50. Puis, j'ai eu mes propres problèmes psychologiques, je suppose, qui m'ont conduit jusqu'à ce disque, des choses non résolues contre lesquelles je luttais. La musique était vraiment très solitaire. Je suppose que c'était moi, à cette époque-là.

Qu'avez-vous lu récemment ?

Je viens juste de lire une flopée de trucs sur des vrais crimes... La dernière chose que j'ai lu et qui m'a fait bondir de ma chaise, style "mec, tu dois lire ça" a été Moby Dick, que je n'avais jamais lu, et qui se trouve ne pas être aussi intimidant que les gens le prétendent – en fait, c'est le récit d'aventure d'un garçon, particulièrement bien raconté. Et puis j'ai lu beaucoup d'écrivains russes – j'ai beaucoup aimé Les Frères Karamazov [de Dostoïevski]... J'ai lu d'une traite Elmore Leonard, qui est fantastique, particulièrement les Western Stories... deux livres sur Isis. J'erre un peu avec mes lectures.

Et la TV ?

Comme tout le monde, j'ai adoré Mad Men. J'ai regardé Breaking Bad. J'ai trouvé que Westworld était réalisé de manière fantastique.

Est-ce difficile d'être marié avec une personne avec laquelle vous travaillez ?

En fait, non. Nous avons développé des sortes de frontières naturelles. Par moments, nous avons une approche plus professionnelle, comme quand je rentre dans le studio pendant qu'elle travaille. Je mets une frontière si elle me demande mon opinion ou me demande de l'aide, je la lui donnerais mais d'une manière professionnelle. Quand elle monte sur scène avec le E Street Band, elle devient membre du E Street Band, et quand nous sortons de scène, nous sommes mari et femme.

Quelles sont les chansons préférées que vous aimez chanter avec elle ?

J'aime Brilliant Disguise, Tougher Than The Rest. Ce sont des chansons que nous chantons ensemble depuis de nombreuses années, et elles capturent notre relation, d'une manière à la fois universelle mais personnelle. Nous chantons Fall Behind ensemble, Mansion On The Hill - Patti peut avoir une voix vraiment gothique quand elle veut. C'est une chanteuse avec une voix caractéristique et c'est une compositrice sous-estimée. Elle a enregistré des albums excellents qui, je pense, à cause de son lien avec moi, ont été sous-évalués. Elle enregistre en ce moment un excellent disque.

Était-elle dans votre vie lorsque vous avez écrit Tougher Than The Rest ? Quand vous chantez cette chanson ensemble, on a l'impression qu'elle a été écrite pour elle.

Um... peut-être que c'était le cas ! Il se pourrait que je ne le sache pas. Aujourd'hui, on a vraiment l'impression que c'est elle et que c'est moi dans cette chanson.

La plupart de vos relations importantes ont duré des décennies : femme, groupe, management, label, même votre guitare principale. Cherchez-vous une vibration familiale dans tous les aspects de votre vie ?

J'aime la constance. Je n'aime pas le changement. Je change avec réticence, particulièrement avec les gens qui m'entourent. Et puis lorsque vous trouvez la bonne personne, vous vous y accrochez. Il y a de l'usure au fil des ans, et parfois je choisis bien et parfois je choisis mal, mais quand je choisis bien je m'accroche. Ma relation avec Jon [Landau, manager de Springsteen depuis le milieu des années 70] est une relation qu'on vit une fois sur un million, et c'est une des relations les plus importantes de ma vie. Et elle maintient son fil créatif depuis le jour où nous avons travaillé ensemble. Je ressens toujours un peu d'excitation lorsque nous nous parlons au téléphone - comme si quelque chose pourrait arriver ! Nous pourrions peut-être apprendre quelque chose que nous ne savions pas les 10.000 autres fois où nous nous sommes parlés. Cette possibilité est toujours présente, similaire à mon expérience avec Patti - quand nous sommes ensemble n'importe quel jour, je pourrais apprendre quelque chose.

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NOTES

"Bruce a pris la poésie de Bob Dylan, la soul des disques Stax, les a posé sur un rythme rock ’n’ roll et a inspiré une génération et une nation” (Melissa Etheridge)

“Bruce était la seule personne que j'ai jamais rencontré qui croyait aussi fort à ce qu'il faisait. Il ne compromettrait pas sa vision: vous ne pouviez le louer, vous ne pouviez l'acheter. Il est cette personne depuis le jour où je l'ai rencontré" (Jimmy Iovine)

"Je ne l'ai jamais connu sans qu'il ait en tête l'esquisse d'une idée. C'est une partie de son ADN" (Jon Landau, manager)

"J'aime le scénario dans ses chansons et sa façon géniale de les présenter. Et en tant que performer, il ne s’arrête jamais - et le public aime ça" (Paul McCartney)

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