****
POTUS BARACK OBAMA: Qu'est-ce que signifie être un Américain ? Ces histoires et tournures d'esprit qui nous unissent en tant que peuple.
Pour la plupart des américains qui ont grandi dans les années 50, les réponses étaient assez simples. Nous étions des travailleurs épris de liberté. De farouches individualistes débordant de confiance. Nous avons ouvert la frontière et construit de puissantes industries et avons permis à chacun de récupérer un morceau du rêve Américain. Nous étions du bon côté de l'histoire; ayant vaincu Hitler et libéré l'Europe. Nous avons monté la garde face à un communisme totalitaire, et athée – afin que le monde soit en sécurité sous l'hégémonie de la démocratie. Nous regardions les mêmes émissions de télévision et écoutions les mêmes programmes à la radio. Nous aimions les Westerns et le base-ball, les hot-dogs et la tarte aux pommes, les voitures rapides et les parades du 4 juillet (1).
C'est l'histoire que nous nous sommes racontés, de toute façon. Mais l'histoire n'était pas complète. Cette version avait laissé de côté beaucoup de choses. Qu'il s'agisse de la discrimination permanente envers les personnes de couleur, des multiples façons de forcer les femmes à rester à leur place. Ou certaines des réalités crues de notre politique étrangère pendant la Guerre Froide. Bruce et moi avons atteint la majorité à une époque où la jeunesse remettait énormément en cause les mythes les plus précieux de l'Amérique. Il en a résulté un fossé de plus en plus creusé chaque jour davantage dans le pays. Une guerre politique et culturelle que nous menons, de beaucoup de façons, encore aujourd'hui.
Mais avant d'aborder ces sujets lourds, Bruce et moi avons décidé de nous livrer à une activité que les Américains adorent : l'ivresse de la route. Je me suis mis derrière le volant de la Corvette vintage de Bruce, garée dans sa ferme. Et nous sommes allés faire un petit tour pour le plaisir. Un de ces tours dont les agents du Secret Service (2) apprécient peu...
[Les cordes d’une guitare électrique sonnent énergiquement]
Pour la plupart des américains qui ont grandi dans les années 50, les réponses étaient assez simples. Nous étions des travailleurs épris de liberté. De farouches individualistes débordant de confiance. Nous avons ouvert la frontière et construit de puissantes industries et avons permis à chacun de récupérer un morceau du rêve Américain. Nous étions du bon côté de l'histoire; ayant vaincu Hitler et libéré l'Europe. Nous avons monté la garde face à un communisme totalitaire, et athée – afin que le monde soit en sécurité sous l'hégémonie de la démocratie. Nous regardions les mêmes émissions de télévision et écoutions les mêmes programmes à la radio. Nous aimions les Westerns et le base-ball, les hot-dogs et la tarte aux pommes, les voitures rapides et les parades du 4 juillet (1).
C'est l'histoire que nous nous sommes racontés, de toute façon. Mais l'histoire n'était pas complète. Cette version avait laissé de côté beaucoup de choses. Qu'il s'agisse de la discrimination permanente envers les personnes de couleur, des multiples façons de forcer les femmes à rester à leur place. Ou certaines des réalités crues de notre politique étrangère pendant la Guerre Froide. Bruce et moi avons atteint la majorité à une époque où la jeunesse remettait énormément en cause les mythes les plus précieux de l'Amérique. Il en a résulté un fossé de plus en plus creusé chaque jour davantage dans le pays. Une guerre politique et culturelle que nous menons, de beaucoup de façons, encore aujourd'hui.
Mais avant d'aborder ces sujets lourds, Bruce et moi avons décidé de nous livrer à une activité que les Américains adorent : l'ivresse de la route. Je me suis mis derrière le volant de la Corvette vintage de Bruce, garée dans sa ferme. Et nous sommes allés faire un petit tour pour le plaisir. Un de ces tours dont les agents du Secret Service (2) apprécient peu...
[Les cordes d’une guitare électrique sonnent énergiquement]
***
[Raté bruyant d’allumage du moteur]
POTUS BARACK OBAMA: Uh oh.
BRUCE SPRINGSTEEN: C’est normal, tu as bien fait.
POTUS BARACK OBAMA: Je ne veux pas...
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu dois juste mettre les gaz.
POTUS BARACK OBAMA: Oh.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu dois appuyer sur l’accélérateur.
POTUS BARACK OBAMA: Allez, Bruce.
[Le moteur démarre]
[Une guitare électrique joue énergiquement]
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui, appuie.
POTUS BARACK OBAMA: On y est.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu as juste besoin d’accélérer... Et pendant que tu relâches l'embrayage, donne un peu de jus.
[Le moteur gronde]
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Allez !
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires] AHHHHH HAAAAAAA !
[Cadillac Ranch de Bruce Springsteen]
POTUS BARACK OBAMA: Il est temps pour nous d’y aller !
BRUCE SPRINGSTEEN: On doit rester dans la ferme ou on peut sortir ?
POTUS BARACK OBAMA: Je peux sortir de la ferme ?... Je sais que le Secret Service va être sur les dents. On est loin de l'océan ?
[Le moteur rugit]
[Cadillac Ranch de Bruce Springsteen continue de jouer]
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires] Vingt minutes. Avant, je faisais le trajet en autostop tous les jours depuis Freehold - 32 kilomètres.
POTUS BARACK OBAMA: La plage est comment ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Ah, ce n'est pas Hawaï.
POTUS BARACK OBAMA: Mais il y a du sable ?
BRUCE SPRINGSTEEN: La côte du New Jersey, une plage de sable. Quel effet ça fait de conduire cette petite bête ?
POTUS BARACK OBAMA: Très sympa, à vrai dire.
[Le moteur rugit]
BRUCE SPRINGSTEEN: Ahhh ! [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Oui, mon pote !
[Cadillac Ranch de Bruce Springsteen: “Cadillac, Cadillac... Long and dark... shiny and black… Open up your engines let 'em roar... Tearin’ up the highway... like a big ol’ dinosauuuuur…]
[La radio remplace la musique]
BRUCE SPRINGSTEEN: Ohhhhhhhhhhh !
POTUS BARACK OBAMA: Le moment est parfait.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu vas prendre, va à droite juste là.
POTUS BARACK OBAMA: A droite, celle-là ? Le Secret Service me suit maintenant. Je suis dans le pétrin, mais tu sais quoi ? Il y a des fois où il faut juste...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Ahhh ! Il fallait le faire !
POTUS BARACK OBAMA: Il fallait le faire !
BRUCE SPRINGSTEEN: Il fallait appuyer sur la pédale. C’est le pied, mec. On se souviendra de celle-là [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Vas-y, mec !
BRUCE SPRINGSTEEN: On se souviendra de celle-là.
POTUS BARACK OBAMA: Photo !
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
[La radio s’éteint]
POTUS BARACK OBAMA: Il fallait qu’on l’essaye !
BRUCE SPRINGSTEEN: Bonne ballade, frère B. Bonne ballade, frère B.
POTUS BARACK OBAMA: C’est juste... On roule et je me disais...
BRUCE SPRINGSTEEN: J’ai essayé de le faire aller à Freehold, mais... [rires]
[La porte s’ouvre]
POTUS BARACK OBAMA: Les gars, je sais que nous sommes en retard. C’est la faute à Bruce.
BRUCE SPRINGSTEEN: C’est vrai.
POTUS BARACK OBAMA: Tout le monde est là ? Tout le monde est prêt... J'assume.
POTUS BARACK OBAMA: Uh oh.
BRUCE SPRINGSTEEN: C’est normal, tu as bien fait.
POTUS BARACK OBAMA: Je ne veux pas...
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu dois juste mettre les gaz.
POTUS BARACK OBAMA: Oh.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu dois appuyer sur l’accélérateur.
POTUS BARACK OBAMA: Allez, Bruce.
[Le moteur démarre]
[Une guitare électrique joue énergiquement]
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui, appuie.
POTUS BARACK OBAMA: On y est.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu as juste besoin d’accélérer... Et pendant que tu relâches l'embrayage, donne un peu de jus.
[Le moteur gronde]
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Allez !
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires] AHHHHH HAAAAAAA !
[Cadillac Ranch de Bruce Springsteen]
POTUS BARACK OBAMA: Il est temps pour nous d’y aller !
BRUCE SPRINGSTEEN: On doit rester dans la ferme ou on peut sortir ?
POTUS BARACK OBAMA: Je peux sortir de la ferme ?... Je sais que le Secret Service va être sur les dents. On est loin de l'océan ?
[Le moteur rugit]
[Cadillac Ranch de Bruce Springsteen continue de jouer]
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires] Vingt minutes. Avant, je faisais le trajet en autostop tous les jours depuis Freehold - 32 kilomètres.
POTUS BARACK OBAMA: La plage est comment ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Ah, ce n'est pas Hawaï.
POTUS BARACK OBAMA: Mais il y a du sable ?
BRUCE SPRINGSTEEN: La côte du New Jersey, une plage de sable. Quel effet ça fait de conduire cette petite bête ?
POTUS BARACK OBAMA: Très sympa, à vrai dire.
[Le moteur rugit]
BRUCE SPRINGSTEEN: Ahhh ! [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Oui, mon pote !
[Cadillac Ranch de Bruce Springsteen: “Cadillac, Cadillac... Long and dark... shiny and black… Open up your engines let 'em roar... Tearin’ up the highway... like a big ol’ dinosauuuuur…]
[La radio remplace la musique]
BRUCE SPRINGSTEEN: Ohhhhhhhhhhh !
POTUS BARACK OBAMA: Le moment est parfait.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu vas prendre, va à droite juste là.
POTUS BARACK OBAMA: A droite, celle-là ? Le Secret Service me suit maintenant. Je suis dans le pétrin, mais tu sais quoi ? Il y a des fois où il faut juste...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Ahhh ! Il fallait le faire !
POTUS BARACK OBAMA: Il fallait le faire !
BRUCE SPRINGSTEEN: Il fallait appuyer sur la pédale. C’est le pied, mec. On se souviendra de celle-là [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Vas-y, mec !
BRUCE SPRINGSTEEN: On se souviendra de celle-là.
POTUS BARACK OBAMA: Photo !
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
[La radio s’éteint]
POTUS BARACK OBAMA: Il fallait qu’on l’essaye !
BRUCE SPRINGSTEEN: Bonne ballade, frère B. Bonne ballade, frère B.
POTUS BARACK OBAMA: C’est juste... On roule et je me disais...
BRUCE SPRINGSTEEN: J’ai essayé de le faire aller à Freehold, mais... [rires]
[La porte s’ouvre]
POTUS BARACK OBAMA: Les gars, je sais que nous sommes en retard. C’est la faute à Bruce.
BRUCE SPRINGSTEEN: C’est vrai.
POTUS BARACK OBAMA: Tout le monde est là ? Tout le monde est prêt... J'assume.
****
POTUS BARACK OBAMA: Donc, un thème qui revient souvent dans tes chansons, un thème présent dans le rock'n'roll, c'est cette idée de prendre la route, de rouler vers l'horizon...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Loin de là où tu es... Vers l'horizon.
BRUCE SPRINGSTEEN: C'est exact.
POTUS BARACK OBAMA: Parfois sans savoir où tu vas.
BRUCE SPRINGSTEEN: C'est exact.
POTUS BARACK OBAMA: Et c'est lié à l'idée de liberté, et c'est lié à l'idée de réinvention de soi.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Changer de peau, s'affranchir du passé et des contraintes subies. Et t'engager dans un acte de re-création, de ré-invention de soi.
BRUCE SPRINGSTEEN: Conduire une voiture est... C'est une démarche directe et offensive vis-à-vis du monde, tu vois ?
ENSEMBLE: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Et c'est marrant, parce que je n'ai pas conduit avant l'âge de 24 ans.
POTUS BARACK OBAMA: Vraiment ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Je ne conduisais pas.
POTUS BARACK OBAMA: Huh.
BRUCE SPRINGSTEEN: Entre 14 et 24 ans, je faisais de l'auto-stop partout où j'allais.
POTUS BARACK OBAMA: Tu ne t'es pas dit, « Mec, j'ai besoin de me trouver un volant ? »
BRUCE SPRINGSTEEN: Euh...
POTUS BARACK OBAMA: Tu n'avais pas le permis ? Ou tu n'avais pas de voiture ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Je n'avais pas le permis et je ne savais pas conduire.
POTUS BARACK OBAMA: Laissez-moi vous dire... Puis-je interrompre la conversation juste pour dire que c'est une bonne chose que tu sois devenu une rockstar.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Parce qu'on pourrait croire, sinon, que tu es un peu timide. Tu sais, ce gamin pas très bien adapté, mec.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: En fait, moi je n'étais pas un grand fan de voitures, mais merde, je voulais passer mon permis.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires] Pas moi !
POTUS BARACK OBAMA: Je voulais le passer pour pouvoir prendre la route.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et bien, j'étais sur la route, mais...
POTUS BARACK OBAMA: Tu fais de l'auto-stop !
BRUCE SPRINGSTEEN: J'étais sur la route, juste moi et mon pouce tendu. A partir de l'âge de 14 ans, et pendant dix ans. J'avais sorti deux albums, mais je continuais à faire de l'auto-stop. Je n'avais pas de voiture.
POTUS BARACK OBAMA: Comment faisais-tu avec les filles, mec ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Elles avaient une voiture ! Elles avaient une voiture ou... Tu dois comprendre que j'allais d'Asbury Park jusqu'à Sea Bright, ou jusqu'à Freehold. Un trajet de 25 kilomètres, tu vois, ce n'était pas le bout du monde.
POTUS BARACK OBAMA: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Je n'avais pas de voyage à faire. Mis à part mon premier voyage, qui était un voyage jusqu'en Californie.
[La guitare électrique joue]
Je suis parti...
[Son d'ambiance d'un moteur de Chevrolet qui gronde]
C'était une Chevrolet de 1948, similaire à celle qu'il y a dans mon garage là bas. Et il n'y avait que moi et autre type, et nous avons perdu tous ceux qui roulaient derrière nous. Ils étaient dans un break, avec un matelas à l'arrière, ils se relayaient pour dormir, se reposer et conduire. Ils se sont perdus à Nashville. Il n'y avait pas de téléphones portables. Nous ne pouvions pas appeler quelqu'un pour savoir où il se trouvait. A cette époque-là, quand quelqu'un était perdu sur la route, c'était fini. Nous n'allions plus entendre parler d'eux jusqu'à notre arrivée en Californie, et nous allions en Californie, à des milliers de kilomètres plus loin. Nous avions trois jours pour y arriver, avant un concert que nous avions à Big Sur. Mais pour y arriver en trois jours, tu ne dois pas t'arrêter de conduire.
Donc, la nuit tombe et mon pote me dit, « Hey, c'est ton tour » [rires] « On va se tuer, mec, je ne peux pas conduire cette voiture. Je ne sais pas conduire ». Il me dit, « Si nous nous arrêtons, nous n'arriverons pas à temps. Si nous n'arrivons pas à temps, nous ne serons pas payés. Si nous ne sommes pas payés, nous n'aurons plus d'argent, parce que nous avons tout dépensé en traversant ce foutu pays ». Donc, je me suis mis derrière le volant.
[La guitare acoustique joue]
BRUCE SPRINGSTEEN: Boite de vitesse manuelle à 4 rapports, une vieille Chevrolet de 1948 à plateau, avec tout notre équipement empilé à l'arrière. Tu vois ?
ENSEMBLE: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Combien de fois as-tu fait hurler l'embayage ? [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Oh, beaucoup de fois. Tout ce qu'on entendait, c'était erghhh, erghhh erghhh erghhh erghhh.
POTUS BARACK OBAMA: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Finalement, je lui dit, « Hey mec, je n'arrive pas à la manier ». Le type me dit alors, « Attends une seconde, j'ai une idée ». Il se met sur le siège conducteur...
[Bruits de moteur]
...il met la première. Il nous met sur la route. « Changeons de place ». Nous changeons de place ! Et...
POTUS BARACK OBAMA: Tu conduis en première.
BRUCE SPRINGSTEEN: Je conduis. Non, je conduis tant que cette voiture avance, je peux passer de la première à la seconde à la troisième.
POTUS BARACK OBAMA: Oh ok. Tu as réussi.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu comprends ? J'arrive à changer les vitesses entre ces trois-là.
POTUS BARACK OBAMA: Oui.
BRUCE SPRINGSTEEN: Donc, nous... J'ai peut-être conduit 160 kilomètres comme ça. Tu vois ?
ENSEMBLE: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Parce que tu es au milieu du pays.
POTUS BARACK OBAMA: Oui.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu peux le faire ! Tu vois ? Et je l'ai fait ! Je l'ai fait pendant deux jours, et c'est comme ça que j'ai appris à conduire.
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
[La guitare acoustique s'estompe]
[Bruit de moteur qui s'éloigne puis disparaît]
BRUCE SPRINGSTEEN: Mais non... Ma propre expérience en dehors de ce que j'ai écrit dans mes chansons était beaucoup plus hésitante lorsqu'il s'agissait de conduire. Tu vois ?
ENSEMBLE: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Je n'avais pas... J'ai toutes ces voitures dans ce garage aujourd'hui, tu vois, tu viens juste de déchirer la route dans ma Corvette. Mais, ah, je ne savais pas conduire. Je ne savais pas réparer un moteur s'il était cassé. Mais je sais ce qu'elles symbolisaient. Je sais que les voitures symbolisaient...
POTUS BARACK OBAMA: L'évasion.
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement. Je connaissais cette valeur symbolique. Tu sais, c'était une époque où A) l'Amérique se sentait encore, très, très, très forte. Très forte. Et la route était romantique. Dans les années 1950, 1960, 1970, les gens se déplaçaient, l'essence était bon marché. Mes premiers longs voyages en voiture, j'avais 20 ans, c'était la traversée de tout le pays jusqu'en Californie, en camion ou en break, une fois par an, pour rendre visite à mes parents, qui s'étaient installés sur la côte Ouest. Je ne pouvais pas prendre l'avion parce que personne n'avait les moyens de se payer un billet d'avion. Je ne pouvais pas leur téléphoner parce que les notes de téléphone étaient vite astronomiques, et nous vivions dans la précarité. Mais, j'étais en communion avec la voiture depuis longtemps. Dans mon livre, je raconte que quelqu'un m'avait dit un jour qu'en cas d'orage, le lieu le plus sûr, c'était le véhicule. Enfant, lorsqu'il y avait de l'orage avec tonnerre et éclairs, je hurlais pour monter dans la voiture. Mes parents me mettaient dans la voiture et roulaient jusqu'à la fin de l'orage. Et le restant de ma vie, j'ai écrit sur les voitures...
J'avais aussi très envie d'écrire des chansons en utilisant les images américaines conventionnelles, pour les réinventer avec ce qui collait aux années 70. Les années 60, c'était les Beach Boys, Chuck Berry, les voitures et les filles, les voitures et les filles. Je ne voulais pas simplement écrire sur les voitures et les filles, je voulais écrire des classiques du rock'n'roll. J'ai donc utilisé ces images et je... Ce que j'ai fait principalement, c'est utiliser ces images-là, mais j'ai ajouté à mes chansons l'effroi qui infiltrait l'air ambiant au cours des années 70.
[Bruce Springsteen - Stolen Car]
Après la Guerre du Vietnam, le pays a cessé d'être innocent. Le pays n'était plus grand ouvert aux quatre vents. C'était une nouvelle ère de limitations. La crise du pétrole, les files d'attente devant les stations-service. Donc, j'ai présenté tous mes personnages dans le contexte d'un nouvel âge américain.
[Bruce Springsteen - Stolen Car : “That tore us apart and made us weep… And I'm driving a stolen car… ]
Comment résonnaient-ils ? Beaucoup plus sombre. Où allaient les gens ? Ils n'étaient pas certain de leur destination. Qu'allaient-ils devenir ? Ils ne savaient pas très bien.
[Bruce Springsteen - Stolen Car : “But I ride by night and I travel in fear…]
Ce sont toutes ces idées-là que je devais placer dans ces voitures, avec mes personnages, et les aider à ce qu'ils les trient.
[Bruce Springsteen - Stolen Car s'estompe]
[PAUSE]
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Loin de là où tu es... Vers l'horizon.
BRUCE SPRINGSTEEN: C'est exact.
POTUS BARACK OBAMA: Parfois sans savoir où tu vas.
BRUCE SPRINGSTEEN: C'est exact.
POTUS BARACK OBAMA: Et c'est lié à l'idée de liberté, et c'est lié à l'idée de réinvention de soi.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Changer de peau, s'affranchir du passé et des contraintes subies. Et t'engager dans un acte de re-création, de ré-invention de soi.
BRUCE SPRINGSTEEN: Conduire une voiture est... C'est une démarche directe et offensive vis-à-vis du monde, tu vois ?
ENSEMBLE: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Et c'est marrant, parce que je n'ai pas conduit avant l'âge de 24 ans.
POTUS BARACK OBAMA: Vraiment ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Je ne conduisais pas.
POTUS BARACK OBAMA: Huh.
BRUCE SPRINGSTEEN: Entre 14 et 24 ans, je faisais de l'auto-stop partout où j'allais.
POTUS BARACK OBAMA: Tu ne t'es pas dit, « Mec, j'ai besoin de me trouver un volant ? »
BRUCE SPRINGSTEEN: Euh...
POTUS BARACK OBAMA: Tu n'avais pas le permis ? Ou tu n'avais pas de voiture ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Je n'avais pas le permis et je ne savais pas conduire.
POTUS BARACK OBAMA: Laissez-moi vous dire... Puis-je interrompre la conversation juste pour dire que c'est une bonne chose que tu sois devenu une rockstar.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Parce qu'on pourrait croire, sinon, que tu es un peu timide. Tu sais, ce gamin pas très bien adapté, mec.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: En fait, moi je n'étais pas un grand fan de voitures, mais merde, je voulais passer mon permis.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires] Pas moi !
POTUS BARACK OBAMA: Je voulais le passer pour pouvoir prendre la route.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et bien, j'étais sur la route, mais...
POTUS BARACK OBAMA: Tu fais de l'auto-stop !
BRUCE SPRINGSTEEN: J'étais sur la route, juste moi et mon pouce tendu. A partir de l'âge de 14 ans, et pendant dix ans. J'avais sorti deux albums, mais je continuais à faire de l'auto-stop. Je n'avais pas de voiture.
POTUS BARACK OBAMA: Comment faisais-tu avec les filles, mec ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Elles avaient une voiture ! Elles avaient une voiture ou... Tu dois comprendre que j'allais d'Asbury Park jusqu'à Sea Bright, ou jusqu'à Freehold. Un trajet de 25 kilomètres, tu vois, ce n'était pas le bout du monde.
POTUS BARACK OBAMA: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Je n'avais pas de voyage à faire. Mis à part mon premier voyage, qui était un voyage jusqu'en Californie.
[La guitare électrique joue]
Je suis parti...
[Son d'ambiance d'un moteur de Chevrolet qui gronde]
C'était une Chevrolet de 1948, similaire à celle qu'il y a dans mon garage là bas. Et il n'y avait que moi et autre type, et nous avons perdu tous ceux qui roulaient derrière nous. Ils étaient dans un break, avec un matelas à l'arrière, ils se relayaient pour dormir, se reposer et conduire. Ils se sont perdus à Nashville. Il n'y avait pas de téléphones portables. Nous ne pouvions pas appeler quelqu'un pour savoir où il se trouvait. A cette époque-là, quand quelqu'un était perdu sur la route, c'était fini. Nous n'allions plus entendre parler d'eux jusqu'à notre arrivée en Californie, et nous allions en Californie, à des milliers de kilomètres plus loin. Nous avions trois jours pour y arriver, avant un concert que nous avions à Big Sur. Mais pour y arriver en trois jours, tu ne dois pas t'arrêter de conduire.
Donc, la nuit tombe et mon pote me dit, « Hey, c'est ton tour » [rires] « On va se tuer, mec, je ne peux pas conduire cette voiture. Je ne sais pas conduire ». Il me dit, « Si nous nous arrêtons, nous n'arriverons pas à temps. Si nous n'arrivons pas à temps, nous ne serons pas payés. Si nous ne sommes pas payés, nous n'aurons plus d'argent, parce que nous avons tout dépensé en traversant ce foutu pays ». Donc, je me suis mis derrière le volant.
[La guitare acoustique joue]
BRUCE SPRINGSTEEN: Boite de vitesse manuelle à 4 rapports, une vieille Chevrolet de 1948 à plateau, avec tout notre équipement empilé à l'arrière. Tu vois ?
ENSEMBLE: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Combien de fois as-tu fait hurler l'embayage ? [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Oh, beaucoup de fois. Tout ce qu'on entendait, c'était erghhh, erghhh erghhh erghhh erghhh.
POTUS BARACK OBAMA: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Finalement, je lui dit, « Hey mec, je n'arrive pas à la manier ». Le type me dit alors, « Attends une seconde, j'ai une idée ». Il se met sur le siège conducteur...
[Bruits de moteur]
...il met la première. Il nous met sur la route. « Changeons de place ». Nous changeons de place ! Et...
POTUS BARACK OBAMA: Tu conduis en première.
BRUCE SPRINGSTEEN: Je conduis. Non, je conduis tant que cette voiture avance, je peux passer de la première à la seconde à la troisième.
POTUS BARACK OBAMA: Oh ok. Tu as réussi.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu comprends ? J'arrive à changer les vitesses entre ces trois-là.
POTUS BARACK OBAMA: Oui.
BRUCE SPRINGSTEEN: Donc, nous... J'ai peut-être conduit 160 kilomètres comme ça. Tu vois ?
ENSEMBLE: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Parce que tu es au milieu du pays.
POTUS BARACK OBAMA: Oui.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tu peux le faire ! Tu vois ? Et je l'ai fait ! Je l'ai fait pendant deux jours, et c'est comme ça que j'ai appris à conduire.
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
[La guitare acoustique s'estompe]
[Bruit de moteur qui s'éloigne puis disparaît]
BRUCE SPRINGSTEEN: Mais non... Ma propre expérience en dehors de ce que j'ai écrit dans mes chansons était beaucoup plus hésitante lorsqu'il s'agissait de conduire. Tu vois ?
ENSEMBLE: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Je n'avais pas... J'ai toutes ces voitures dans ce garage aujourd'hui, tu vois, tu viens juste de déchirer la route dans ma Corvette. Mais, ah, je ne savais pas conduire. Je ne savais pas réparer un moteur s'il était cassé. Mais je sais ce qu'elles symbolisaient. Je sais que les voitures symbolisaient...
POTUS BARACK OBAMA: L'évasion.
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement. Je connaissais cette valeur symbolique. Tu sais, c'était une époque où A) l'Amérique se sentait encore, très, très, très forte. Très forte. Et la route était romantique. Dans les années 1950, 1960, 1970, les gens se déplaçaient, l'essence était bon marché. Mes premiers longs voyages en voiture, j'avais 20 ans, c'était la traversée de tout le pays jusqu'en Californie, en camion ou en break, une fois par an, pour rendre visite à mes parents, qui s'étaient installés sur la côte Ouest. Je ne pouvais pas prendre l'avion parce que personne n'avait les moyens de se payer un billet d'avion. Je ne pouvais pas leur téléphoner parce que les notes de téléphone étaient vite astronomiques, et nous vivions dans la précarité. Mais, j'étais en communion avec la voiture depuis longtemps. Dans mon livre, je raconte que quelqu'un m'avait dit un jour qu'en cas d'orage, le lieu le plus sûr, c'était le véhicule. Enfant, lorsqu'il y avait de l'orage avec tonnerre et éclairs, je hurlais pour monter dans la voiture. Mes parents me mettaient dans la voiture et roulaient jusqu'à la fin de l'orage. Et le restant de ma vie, j'ai écrit sur les voitures...
J'avais aussi très envie d'écrire des chansons en utilisant les images américaines conventionnelles, pour les réinventer avec ce qui collait aux années 70. Les années 60, c'était les Beach Boys, Chuck Berry, les voitures et les filles, les voitures et les filles. Je ne voulais pas simplement écrire sur les voitures et les filles, je voulais écrire des classiques du rock'n'roll. J'ai donc utilisé ces images et je... Ce que j'ai fait principalement, c'est utiliser ces images-là, mais j'ai ajouté à mes chansons l'effroi qui infiltrait l'air ambiant au cours des années 70.
[Bruce Springsteen - Stolen Car]
Après la Guerre du Vietnam, le pays a cessé d'être innocent. Le pays n'était plus grand ouvert aux quatre vents. C'était une nouvelle ère de limitations. La crise du pétrole, les files d'attente devant les stations-service. Donc, j'ai présenté tous mes personnages dans le contexte d'un nouvel âge américain.
[Bruce Springsteen - Stolen Car : “That tore us apart and made us weep… And I'm driving a stolen car… ]
Comment résonnaient-ils ? Beaucoup plus sombre. Où allaient les gens ? Ils n'étaient pas certain de leur destination. Qu'allaient-ils devenir ? Ils ne savaient pas très bien.
[Bruce Springsteen - Stolen Car : “But I ride by night and I travel in fear…]
Ce sont toutes ces idées-là que je devais placer dans ces voitures, avec mes personnages, et les aider à ce qu'ils les trient.
[Bruce Springsteen - Stolen Car s'estompe]
[PAUSE]
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POTUS BARACK OBAMA: Pour moi, un des aspects essentiels de ce que c'est qu'être Américain, c'est de s'échapper de là où tu es. Sauf que là où je suis, c'est le Paradis, à Hawaï, d'accord ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui, et tu veux t'échapper [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Donc, quelque part, tu te dis, « Je dois prendre la route ».
BRUCE SPRINGSTEEN: Mais tu es sur une île ! [rires]
POTUS BARACK OBAMA: La route ne mène pas très loin ! Je me souviens de la première fois où j'ai visité l'Amérique continentale.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: C’était ma mère et ma grand-mère qui avaient décidé qu’il était temps pour moi d’y aller. Et donc, toutes les deux, avec moi et ma sœur de deux ans...
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: ...nous avons d’abord pris l’avion jusqu’à Seattle, là où ma mère avait été au lycée. Puis, nous avons pris un bus Greyhound (3) jusqu’à San Francisco.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Los Angeles. Puis, le train jusqu’en Arizona.
[Archive d’une publicité de l’Arizona : « Là où le ciel est bleu au-delà de l’imagination...]
Kansas City jusqu’à Chicago.
[Archive d’une publicité de Chicago : « Chicago est une ville que tu vas voir juste pour toi-même...]
On loue ensuite une voiture, direction Yellowstone.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
[Archive de Yellowstone : « Le parc national de Yellowstone est la plus vieille, la plus grande et la plus belle terre de vacances]
POTUS BARACK OBAMA: Ma mère ne conduisait pas. Elle n’avait pas le permis.
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord.
POTUS BARACK OBAMA: Ma grand-mère conduisait, mais elle commençait à voir de moins en moins.
BRUCE SPRINGSTEEN: Ok.
POTUS BARACK OBAMA: Donc, je me souviens qu'au crépuscule, on me mettait devant pour que je puisse diriger ma grand-mère correctement [rires], alors que nous abordions les virages sur la route.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Et, tu parlais de l'immensité du pays, et je me revois regarder par la vitre des bus Greyhound et des trains.
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord.
POTUS BARACK OBAMA: Et regarder par la fenêtre de la voiture.
[La guitare joue]
Des champs de maïs à perte de vue, le désert à perte de vue, les forêts à perte de vue, ou les montagnes à perte de vue, et je me disais, « Imagine un peu où tu peux aller. Tu peux aller partout et, sous-entendu, tu peux faire ce que tu veux, devenir celui que tu veux » Tu comprends ? Et ce premier voyage, je m’en souviens encore aujourd’hui. Et tu sais, on s’arrêtait dans des Howard Johnson's (4).
[La télévision s’allume]
[Archive d’une publicité Howard Johnson : « Vous verrez que c’est bien plus marrant d’être un enfant chez Howard Johnsons...]
[Ambiance d’enfants criant d’excitation]
Le plus excitant, c'était... La machine à glaçons. Et tu sais, ta mère et ta grand-mère qui te payent...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: ...une canette de soda. Et si tu étais vraiment chanceux, certains de ces hôtels avaient une petite piscine à l’arrière.
BRUCE SPRINGSTEEN: Excellent.
POTUS BARACK OBAMA: Et s’il y avait une piscine, c’était...
BRUCE SPRINGSTEEN: Le Paradis sur Terre !
POTUS BARACK OBAMA: C’est exactement ça.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires] La grande vie.
POTUS BARACK OBAMA: Le grand luxe.
[Archive du Sénateur Howard Baker questionnant M. Haldeman pendant les auditions du Watergate (5) : « Vous étiez proche du Président des États-Unis, plus proche que n’importe quelle autre personne dans le monde, à part sa famille. Que savait le Président et à quelle date il le savait ?... »]
POTUS BARACK OBAMA: Nous sommes en 1973, nous sommes donc au milieu des auditions du Watergate. Chaque soir...
[Archive du Sénateur Howard Baker questionnant M. Haldeman pendant les auditions du Watergate : « ...sur le Watergate... »]
POTUS BARACK OBAMA: ...ma mère allumait le petit téléviseur noir et blanc qu’il y avait dans le motel.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Et on s’installait et je regardais Sam Ervin (5).
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord.
POTUS BARACK OBAMA: Et Danny Inouye (5). Nous étions très fiers car Danny Inouye faisait partie de la Commission.
BRUCE SPRINGSTEEN: Hawaïen, oui.
POTUS BARACK OBAMA: C’était le sénateur d’Hawaï.
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord.
POTUS BARACK OBAMA: Un héros de la Seconde Guerre Mondiale.
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord !
POTUS BARACK OBAMA: Il y avait perdu un bras. Et c’était probablement formateur pour moi, en terme de politique. Parce que ma mère n'arrêtait pas de dire, « Qu’est-ce que tu attendais ? Nixon était un McCarthyste (6) ! » Tu vois. Mais ce sont des souvenirs que je n’ai jamais oubliés.
POTUS BARACK OBAMA: Et c’était...
BRUCE SPRINGSTEEN: De jolis souvenirs.
POTUS BARACK OBAMA: Et c'était cohérent avec ma propre sensibilité, à savoir que, bien que j'aimais Hawaï, j'allais devoir entreprendre une sorte de voyage, afin de découvrir celui que j'étais. Je me souviens que lorsque j'étais à l'université, j'avais une vieille Fiat cabossée, une voiture misérable.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Et je partais rouler. Elle était chez le garagiste à peu près tous les 15 jours, mais c'était un bolide quand elle marchait. Une cinq vitesses. Et je me souviens qu'elle est tombée en panne sur l'autoroute entre Los Angeles et San Francisco, et j'ai été obligé de rentrer en stop avec des routiers.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui !
POTUS BARACK OBAMA: Et il pleut à verse et tu n'as pas de téléphone portable, tu n'as pas d'argent. Peut-être juste un peu de monnaie, tu dois trouver une cabine téléphonique, tu dois appeller un copain, pour savoir s'il peut venir te chercher, et tu essayes de regarder autour de toi pour savoir dans quelle rue tu es. Mais à chaque fois... A chaque fois, j'ai toujours eu l'impression que...
[La guitare électrique douce joue]
...et je pense que c'est essentiellement Américain, de prendre la route pour partir à l'aventure comme Ulysse.
BRUCE SPRINGSTEEN: C'est exact. Ton Hégire. C'est un voyage pour découvrir ton âme.
POTUS BARACK OBAMA: Tu découvres de quel bois tu es fait.
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement. Celui que tu es.
POTUS BARACK OBAMA: Il y a eu un autre moment comme ça pour moi, c'est quand j'ai accepté un poste de militant associatif à Chicago. Un groupement d'églises m'embauche pour 13 000 dollars par an, me donne 2 000 dollars pour acheter une voiture, et je prends une petite Honda Civic à hayons. Je mets toutes mes affaires dedans, et je fais le voyage de New York à Chicago, je traverse l'Ohio. Je ne connais personne à Chicago à ce moment-là, et je ne sais pas du tout comment je vais m'y prendre avec ces fidèles et ces ouvriers de la sidérurgie qui avaient été licenciés. J'ai 23 ans, et je ne sais rien de rien. Je quitte New York, mes amis, tout ce que je connais. A mi-parcours, je m'arrête dans une petite ville dans l'Ohio, et je descends dans un motel. Le type à l’accueil, je remarque qu'il se sent seul, et il me demande, « Où est-ce que vous allez ? Qu'est-ce que vous faites ? ». Et je lui réponds, « Et bien, je vais être militant associatif ». Il me dit, « C'est quoi ce truc ? Vous êtes sûr que c'est ce vous voulez faire de votre vie ? ». Me voilà au milieu de nulle part, tout seul dans ma chambre d’hôtel, assailli par le doute, me dirigeant vers un endroit inconnu... avec cette sensation de ne pas savoir ce qui m'attend.
BRUCE SPRINGSTEEN: Curieux du monde.
POTUS BARACK OBAMA: Tu te lances à l'aventure. Même sur le coup, il y avait ce sentiment que la route t'offrait quelque chose. « Je ne sais pas ce qui m'attend au prochain virage, mais j'ai envie de savoir ».
BRUCE SPRINGSTEEN: C'est un moment magnifique. Un moment vraiment magnifique quand tu y repenses après coup.
POTUS BARACK OBAMA: Même si j'ai un peu peur, hein ? Il est difficile de retrouver ce genre de sensation. La route est pleine de surprises et d'aventures, mais ce qui est vrai également, c'est que tu prends la route, et à un certain moment, tu réalises, « Oui, tu peux te réinventer. Oui, tu peux te découvrir. Mais au final, tu as toujours ce désir d'avoir un foyer où te poser ».
[La guitare électrique douce s'estompe]
Et la tension de l'Amérique, c'est cette idée que... Nous voulons nous réinventer et être libre, mais nous voulons aussi trouver une communauté, parce qu'il y a aussi un sentiment de solitude liée à la route.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oh mec.
POTUS BARACK OBAMA: La face la plus sombre de la route, c'est ce vagabond, solitaire, sans racine, sans amarre et...
BRUCE SPRINGSTEEN: Et bien...
POTUS BARACK OBAMA: ...ce lieu.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et c'est ce dont nous parlions l'autre jour au sujet de la masculinité et des icônes. Ce sont les icônes qui nous ont été vendues : les héros des Westerns. Ils étaient solitaires. Ce n'était jamais des pères, jamais des maris, ils ne faisaient que passer, toujours.
POTUS BARACK OBAMA: Oui, ces cow-boys, Gary Cooper, Clint Eastwood.
BRUCE SPRINGSTEEN: Ils ne faisaient que passer, toujours.
POTUS BARACK OBAMA: Shane... (7)
BRUCE SPRINGSTEEN: High... Plains... Drifter (8)
POTUS BARACK OBAMA: High Plains Drifter.
ENSEMBLE: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Exact.
BRUCE SPRINGSTEEN: Le vagabond. Et l'exemple ultime se trouve dans The Searchers de John Ford (9).
[The Searchers - musique de Max Steiner – Musique de la réunion entre Ethan et Debbie]
Tu as John Wayne, qui est un misanthrope. Il sait parfaitement utiliser la force pour protéger la communauté, mais il n'arrive pas à rejoindre lui-même une communauté. Il y a cette scène-clé à la fin de The Searchers, où John Wayne retrouve Nathalie Wood.
[Audio de “The Searchers” John Wayne : “Rentrons à la maison Debbie”]
[The Searchers - musique de Max Steiner - Home Again est jouée]
Il ramène Nathalie Wood à sa famille, la famille entière s'engouffre à l'intérieur de la maison, et la porte se referme. John Wayne reste sur le seuil, et la porte - la communauté elle-même - se referme, et il s'éloigne dans le désert. Et c'est le dernier plan du film.
[The Searchers - musique de Max Steiner - Home Again : “Il sait qu'il te trouvera, mais où mon Dieu...]
Quand j'étais jeune, je pensais être comme lui, et c'est ce que j'ai essayé de continuer à vivre après la trentaine - jusqu'au jour où j'ai traversé le pays en voiture avec un ami. Nous avions déjà fait plusieurs voyages, j'avais déjà traversé le pays quelque fois déjà à ce moment-là. J'ai toujours aimé ça, je me disais, « Si j'ai des idées noires, ces kilomètres de route pourraient juste... Je pourrais les faire disparaître en roulant, tu vois ? » Sauf que cette fois-ci je suis allé en Californie, et je me sentais atrocement mal. J'avais envie de remonter en voiture et de faire le trajet en sens inverse. Mais j'ai compris que si je le faisais, je voudrais à nouveau remonter en voiture et faire encore demi-tour. Sincèrement, je ne voulais pas m'arrêter de bouger... Quelque chose s'est véritablement brisé en moi. Et c'est là que j'ai appelé un ami, j'ai appelé Jon et je lui ai dit, « J'ai un vrai problème ». Il m'a donné un numéro. Et je suis allé dans le cabinet d'un homme que je n'avais jamais vu de toute ma vie, à Beverly Hills ou à Pacific Palisades, quelque part à Los Angeles. Je l'ai regardé. C'était un petit homme âgé, avec des cheveux blancs et une moustache. Il y avait une chaise vide. Je me suis assis dessus et j'ai éclaté en sanglot pendant 10 minutes.
Je me prenais en pleine figure les conséquences de mes actes, les deux tempêtes que j'avais semées : le désir, en théorie, de vouloir être libre, mais avec ce besoin profond à présent, à mon âge, de racines, de famille, d'un véritable foyer, d'un foyer spirituel - ce besoin d’arrêter de courir. De s'affirmer, de faire des choix, de dire : je vais passer le reste de ma vie avec toi, je vais faire ma vie ici, je vais faire ce boulot toute ma vie. Et ce sont les choses auxquelles je tiens et sur lesquelles je veux me consacrer : notre amour, nos projets, notre maison. J'étais arrivé à un moment de ma vie où j'avais besoin de faire ces choix-là afin de vivre ... D'avoir une vie, tu comprends ? Ma vie a changé à partir de ce jour-là. Juste après je me suis marié, mais ça n'a pas marché la première fois. Mais quelques temps après, j'ai rencontré Patti et nous avons fondé un foyer, et j'ai réalisé, « Hey, je continue encore de prendre la route, je prends encore la moto de temps en temps, quelques centaines de kilomètres et puis je reviens ». Aujourd'hui, je n'en ai plus envie. Même si toi et moi, nous pourrions sauter dans la Corvette et prendre la Route 66, même si Michelle et Patti pourraient bien nous botter le cul. Non ? [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Oui. Je ne sais pas si nous pourrions aller bien loin.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Tu sais, regarde cette idée d'être domestiqué.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Les Américains, les hommes américains en particulier, on leur apprend à résister à ça.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Et dans ta musique, je perçois l'idée que, d'un côté, nous cherchons à nous affranchir de ces contraintes collectives - celles des petites villes et des communautés rurales, de notre voisinage. Pour prendre la route vers la grande ville, accomplir quelque chose de grand, fuir le passé. Montrer aux autres qu'il ne fallait pas nous sous-estimer. Mais c'est une facette, et il existe une autre facette, celle où se trouve la famille.
BRUCE SPRINGSTEEN: J'aime à penser que c'est notre argument noble. Où se trouve la frontière entre individualisme et esprit de communauté ? Et à quel moment de notre histoire penche la balance ? Sur quoi mettre l'accent ? J'ai spontanément commencé comme un populiste, sans doute en raison de mes origines. Selon moi, ceux qui avaient fait l'Amérique étaient ceux qui avaient fait mon quartier, ceux qui sont originaires de ma petite ville.
POTUS BARACK OBAMA: Il arrive un moment où tu as réussi à te réinventer personnellement du mieux possible, et tu as besoin de planter un drapeau. De camper sur tes positions et de permettre aux autres de voir qui tu es, mais aussi de te juger pour estimer ta réussite ou non à vivre selon le code que tu t'es choisi. Peux-tu faire preuve de constance ? Es-tu capable de prendre tes responsabilités ? Tout ce qui, en fin de compte, relève d'une satisfaction d'un autre ordre, mais qui est synonyme de maturité. Parce que tu sais, contrairement à ce qui dit la chanson d'un grand maître américain, nous ne sommes généralement pas nés pour courir.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: La plupart sont nés pour courir un peu, avant de rentrer à la maison.
[Une guitare acoustique joue]
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement. Tu trouves ta liberté dans une vie faite de limites, et je n'y croyais pas avant de l'avoir personnellement expérimenté moi-même. J'ai souvent dit que j'étais plus libre maintenant que je ne l'étais lorsque je me croyais libre. Quand arrive le moment où tu veux vraiment trouver ta liberté, il faut que tu te poses, que tu trouves un endroit où te fixer, puis tu laisses tout ça s'épanouir.
POTUS BARACK OBAMA: Et donc, pour ce qui me concerne, Michelle et Chicago... Chicago est devenu mon foyer en premier et puis Michelle est devenue l’incarnation de cette connexion que j'avais faite avec un lieu et une communauté. Et ce qui est intéressant, c'est qu'en trouvant ce lieu, j'ai été ensuite capable de comprendre que Hawaï était aussi mon foyer.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Car je pouvais voir désormais comment toutes ces parties de moi s’emboîtaient ensemble.
[La guitare acoustique s'estompe]
[PAUSE]
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui, et tu veux t'échapper [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Donc, quelque part, tu te dis, « Je dois prendre la route ».
BRUCE SPRINGSTEEN: Mais tu es sur une île ! [rires]
POTUS BARACK OBAMA: La route ne mène pas très loin ! Je me souviens de la première fois où j'ai visité l'Amérique continentale.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: C’était ma mère et ma grand-mère qui avaient décidé qu’il était temps pour moi d’y aller. Et donc, toutes les deux, avec moi et ma sœur de deux ans...
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: ...nous avons d’abord pris l’avion jusqu’à Seattle, là où ma mère avait été au lycée. Puis, nous avons pris un bus Greyhound (3) jusqu’à San Francisco.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Los Angeles. Puis, le train jusqu’en Arizona.
[Archive d’une publicité de l’Arizona : « Là où le ciel est bleu au-delà de l’imagination...]
Kansas City jusqu’à Chicago.
[Archive d’une publicité de Chicago : « Chicago est une ville que tu vas voir juste pour toi-même...]
On loue ensuite une voiture, direction Yellowstone.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
[Archive de Yellowstone : « Le parc national de Yellowstone est la plus vieille, la plus grande et la plus belle terre de vacances]
POTUS BARACK OBAMA: Ma mère ne conduisait pas. Elle n’avait pas le permis.
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord.
POTUS BARACK OBAMA: Ma grand-mère conduisait, mais elle commençait à voir de moins en moins.
BRUCE SPRINGSTEEN: Ok.
POTUS BARACK OBAMA: Donc, je me souviens qu'au crépuscule, on me mettait devant pour que je puisse diriger ma grand-mère correctement [rires], alors que nous abordions les virages sur la route.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Et, tu parlais de l'immensité du pays, et je me revois regarder par la vitre des bus Greyhound et des trains.
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord.
POTUS BARACK OBAMA: Et regarder par la fenêtre de la voiture.
[La guitare joue]
Des champs de maïs à perte de vue, le désert à perte de vue, les forêts à perte de vue, ou les montagnes à perte de vue, et je me disais, « Imagine un peu où tu peux aller. Tu peux aller partout et, sous-entendu, tu peux faire ce que tu veux, devenir celui que tu veux » Tu comprends ? Et ce premier voyage, je m’en souviens encore aujourd’hui. Et tu sais, on s’arrêtait dans des Howard Johnson's (4).
[La télévision s’allume]
[Archive d’une publicité Howard Johnson : « Vous verrez que c’est bien plus marrant d’être un enfant chez Howard Johnsons...]
[Ambiance d’enfants criant d’excitation]
Le plus excitant, c'était... La machine à glaçons. Et tu sais, ta mère et ta grand-mère qui te payent...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: ...une canette de soda. Et si tu étais vraiment chanceux, certains de ces hôtels avaient une petite piscine à l’arrière.
BRUCE SPRINGSTEEN: Excellent.
POTUS BARACK OBAMA: Et s’il y avait une piscine, c’était...
BRUCE SPRINGSTEEN: Le Paradis sur Terre !
POTUS BARACK OBAMA: C’est exactement ça.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires] La grande vie.
POTUS BARACK OBAMA: Le grand luxe.
[Archive du Sénateur Howard Baker questionnant M. Haldeman pendant les auditions du Watergate (5) : « Vous étiez proche du Président des États-Unis, plus proche que n’importe quelle autre personne dans le monde, à part sa famille. Que savait le Président et à quelle date il le savait ?... »]
POTUS BARACK OBAMA: Nous sommes en 1973, nous sommes donc au milieu des auditions du Watergate. Chaque soir...
[Archive du Sénateur Howard Baker questionnant M. Haldeman pendant les auditions du Watergate : « ...sur le Watergate... »]
POTUS BARACK OBAMA: ...ma mère allumait le petit téléviseur noir et blanc qu’il y avait dans le motel.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Et on s’installait et je regardais Sam Ervin (5).
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord.
POTUS BARACK OBAMA: Et Danny Inouye (5). Nous étions très fiers car Danny Inouye faisait partie de la Commission.
BRUCE SPRINGSTEEN: Hawaïen, oui.
POTUS BARACK OBAMA: C’était le sénateur d’Hawaï.
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord.
POTUS BARACK OBAMA: Un héros de la Seconde Guerre Mondiale.
BRUCE SPRINGSTEEN: D’accord !
POTUS BARACK OBAMA: Il y avait perdu un bras. Et c’était probablement formateur pour moi, en terme de politique. Parce que ma mère n'arrêtait pas de dire, « Qu’est-ce que tu attendais ? Nixon était un McCarthyste (6) ! » Tu vois. Mais ce sont des souvenirs que je n’ai jamais oubliés.
POTUS BARACK OBAMA: Et c’était...
BRUCE SPRINGSTEEN: De jolis souvenirs.
POTUS BARACK OBAMA: Et c'était cohérent avec ma propre sensibilité, à savoir que, bien que j'aimais Hawaï, j'allais devoir entreprendre une sorte de voyage, afin de découvrir celui que j'étais. Je me souviens que lorsque j'étais à l'université, j'avais une vieille Fiat cabossée, une voiture misérable.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Et je partais rouler. Elle était chez le garagiste à peu près tous les 15 jours, mais c'était un bolide quand elle marchait. Une cinq vitesses. Et je me souviens qu'elle est tombée en panne sur l'autoroute entre Los Angeles et San Francisco, et j'ai été obligé de rentrer en stop avec des routiers.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui !
POTUS BARACK OBAMA: Et il pleut à verse et tu n'as pas de téléphone portable, tu n'as pas d'argent. Peut-être juste un peu de monnaie, tu dois trouver une cabine téléphonique, tu dois appeller un copain, pour savoir s'il peut venir te chercher, et tu essayes de regarder autour de toi pour savoir dans quelle rue tu es. Mais à chaque fois... A chaque fois, j'ai toujours eu l'impression que...
[La guitare électrique douce joue]
...et je pense que c'est essentiellement Américain, de prendre la route pour partir à l'aventure comme Ulysse.
BRUCE SPRINGSTEEN: C'est exact. Ton Hégire. C'est un voyage pour découvrir ton âme.
POTUS BARACK OBAMA: Tu découvres de quel bois tu es fait.
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement. Celui que tu es.
POTUS BARACK OBAMA: Il y a eu un autre moment comme ça pour moi, c'est quand j'ai accepté un poste de militant associatif à Chicago. Un groupement d'églises m'embauche pour 13 000 dollars par an, me donne 2 000 dollars pour acheter une voiture, et je prends une petite Honda Civic à hayons. Je mets toutes mes affaires dedans, et je fais le voyage de New York à Chicago, je traverse l'Ohio. Je ne connais personne à Chicago à ce moment-là, et je ne sais pas du tout comment je vais m'y prendre avec ces fidèles et ces ouvriers de la sidérurgie qui avaient été licenciés. J'ai 23 ans, et je ne sais rien de rien. Je quitte New York, mes amis, tout ce que je connais. A mi-parcours, je m'arrête dans une petite ville dans l'Ohio, et je descends dans un motel. Le type à l’accueil, je remarque qu'il se sent seul, et il me demande, « Où est-ce que vous allez ? Qu'est-ce que vous faites ? ». Et je lui réponds, « Et bien, je vais être militant associatif ». Il me dit, « C'est quoi ce truc ? Vous êtes sûr que c'est ce vous voulez faire de votre vie ? ». Me voilà au milieu de nulle part, tout seul dans ma chambre d’hôtel, assailli par le doute, me dirigeant vers un endroit inconnu... avec cette sensation de ne pas savoir ce qui m'attend.
BRUCE SPRINGSTEEN: Curieux du monde.
POTUS BARACK OBAMA: Tu te lances à l'aventure. Même sur le coup, il y avait ce sentiment que la route t'offrait quelque chose. « Je ne sais pas ce qui m'attend au prochain virage, mais j'ai envie de savoir ».
BRUCE SPRINGSTEEN: C'est un moment magnifique. Un moment vraiment magnifique quand tu y repenses après coup.
POTUS BARACK OBAMA: Même si j'ai un peu peur, hein ? Il est difficile de retrouver ce genre de sensation. La route est pleine de surprises et d'aventures, mais ce qui est vrai également, c'est que tu prends la route, et à un certain moment, tu réalises, « Oui, tu peux te réinventer. Oui, tu peux te découvrir. Mais au final, tu as toujours ce désir d'avoir un foyer où te poser ».
[La guitare électrique douce s'estompe]
Et la tension de l'Amérique, c'est cette idée que... Nous voulons nous réinventer et être libre, mais nous voulons aussi trouver une communauté, parce qu'il y a aussi un sentiment de solitude liée à la route.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oh mec.
POTUS BARACK OBAMA: La face la plus sombre de la route, c'est ce vagabond, solitaire, sans racine, sans amarre et...
BRUCE SPRINGSTEEN: Et bien...
POTUS BARACK OBAMA: ...ce lieu.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et c'est ce dont nous parlions l'autre jour au sujet de la masculinité et des icônes. Ce sont les icônes qui nous ont été vendues : les héros des Westerns. Ils étaient solitaires. Ce n'était jamais des pères, jamais des maris, ils ne faisaient que passer, toujours.
POTUS BARACK OBAMA: Oui, ces cow-boys, Gary Cooper, Clint Eastwood.
BRUCE SPRINGSTEEN: Ils ne faisaient que passer, toujours.
POTUS BARACK OBAMA: Shane... (7)
BRUCE SPRINGSTEEN: High... Plains... Drifter (8)
POTUS BARACK OBAMA: High Plains Drifter.
ENSEMBLE: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Exact.
BRUCE SPRINGSTEEN: Le vagabond. Et l'exemple ultime se trouve dans The Searchers de John Ford (9).
[The Searchers - musique de Max Steiner – Musique de la réunion entre Ethan et Debbie]
Tu as John Wayne, qui est un misanthrope. Il sait parfaitement utiliser la force pour protéger la communauté, mais il n'arrive pas à rejoindre lui-même une communauté. Il y a cette scène-clé à la fin de The Searchers, où John Wayne retrouve Nathalie Wood.
[Audio de “The Searchers” John Wayne : “Rentrons à la maison Debbie”]
[The Searchers - musique de Max Steiner - Home Again est jouée]
Il ramène Nathalie Wood à sa famille, la famille entière s'engouffre à l'intérieur de la maison, et la porte se referme. John Wayne reste sur le seuil, et la porte - la communauté elle-même - se referme, et il s'éloigne dans le désert. Et c'est le dernier plan du film.
[The Searchers - musique de Max Steiner - Home Again : “Il sait qu'il te trouvera, mais où mon Dieu...]
Quand j'étais jeune, je pensais être comme lui, et c'est ce que j'ai essayé de continuer à vivre après la trentaine - jusqu'au jour où j'ai traversé le pays en voiture avec un ami. Nous avions déjà fait plusieurs voyages, j'avais déjà traversé le pays quelque fois déjà à ce moment-là. J'ai toujours aimé ça, je me disais, « Si j'ai des idées noires, ces kilomètres de route pourraient juste... Je pourrais les faire disparaître en roulant, tu vois ? » Sauf que cette fois-ci je suis allé en Californie, et je me sentais atrocement mal. J'avais envie de remonter en voiture et de faire le trajet en sens inverse. Mais j'ai compris que si je le faisais, je voudrais à nouveau remonter en voiture et faire encore demi-tour. Sincèrement, je ne voulais pas m'arrêter de bouger... Quelque chose s'est véritablement brisé en moi. Et c'est là que j'ai appelé un ami, j'ai appelé Jon et je lui ai dit, « J'ai un vrai problème ». Il m'a donné un numéro. Et je suis allé dans le cabinet d'un homme que je n'avais jamais vu de toute ma vie, à Beverly Hills ou à Pacific Palisades, quelque part à Los Angeles. Je l'ai regardé. C'était un petit homme âgé, avec des cheveux blancs et une moustache. Il y avait une chaise vide. Je me suis assis dessus et j'ai éclaté en sanglot pendant 10 minutes.
Je me prenais en pleine figure les conséquences de mes actes, les deux tempêtes que j'avais semées : le désir, en théorie, de vouloir être libre, mais avec ce besoin profond à présent, à mon âge, de racines, de famille, d'un véritable foyer, d'un foyer spirituel - ce besoin d’arrêter de courir. De s'affirmer, de faire des choix, de dire : je vais passer le reste de ma vie avec toi, je vais faire ma vie ici, je vais faire ce boulot toute ma vie. Et ce sont les choses auxquelles je tiens et sur lesquelles je veux me consacrer : notre amour, nos projets, notre maison. J'étais arrivé à un moment de ma vie où j'avais besoin de faire ces choix-là afin de vivre ... D'avoir une vie, tu comprends ? Ma vie a changé à partir de ce jour-là. Juste après je me suis marié, mais ça n'a pas marché la première fois. Mais quelques temps après, j'ai rencontré Patti et nous avons fondé un foyer, et j'ai réalisé, « Hey, je continue encore de prendre la route, je prends encore la moto de temps en temps, quelques centaines de kilomètres et puis je reviens ». Aujourd'hui, je n'en ai plus envie. Même si toi et moi, nous pourrions sauter dans la Corvette et prendre la Route 66, même si Michelle et Patti pourraient bien nous botter le cul. Non ? [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Oui. Je ne sais pas si nous pourrions aller bien loin.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Tu sais, regarde cette idée d'être domestiqué.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Les Américains, les hommes américains en particulier, on leur apprend à résister à ça.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Et dans ta musique, je perçois l'idée que, d'un côté, nous cherchons à nous affranchir de ces contraintes collectives - celles des petites villes et des communautés rurales, de notre voisinage. Pour prendre la route vers la grande ville, accomplir quelque chose de grand, fuir le passé. Montrer aux autres qu'il ne fallait pas nous sous-estimer. Mais c'est une facette, et il existe une autre facette, celle où se trouve la famille.
BRUCE SPRINGSTEEN: J'aime à penser que c'est notre argument noble. Où se trouve la frontière entre individualisme et esprit de communauté ? Et à quel moment de notre histoire penche la balance ? Sur quoi mettre l'accent ? J'ai spontanément commencé comme un populiste, sans doute en raison de mes origines. Selon moi, ceux qui avaient fait l'Amérique étaient ceux qui avaient fait mon quartier, ceux qui sont originaires de ma petite ville.
POTUS BARACK OBAMA: Il arrive un moment où tu as réussi à te réinventer personnellement du mieux possible, et tu as besoin de planter un drapeau. De camper sur tes positions et de permettre aux autres de voir qui tu es, mais aussi de te juger pour estimer ta réussite ou non à vivre selon le code que tu t'es choisi. Peux-tu faire preuve de constance ? Es-tu capable de prendre tes responsabilités ? Tout ce qui, en fin de compte, relève d'une satisfaction d'un autre ordre, mais qui est synonyme de maturité. Parce que tu sais, contrairement à ce qui dit la chanson d'un grand maître américain, nous ne sommes généralement pas nés pour courir.
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: La plupart sont nés pour courir un peu, avant de rentrer à la maison.
[Une guitare acoustique joue]
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement. Tu trouves ta liberté dans une vie faite de limites, et je n'y croyais pas avant de l'avoir personnellement expérimenté moi-même. J'ai souvent dit que j'étais plus libre maintenant que je ne l'étais lorsque je me croyais libre. Quand arrive le moment où tu veux vraiment trouver ta liberté, il faut que tu te poses, que tu trouves un endroit où te fixer, puis tu laisses tout ça s'épanouir.
POTUS BARACK OBAMA: Et donc, pour ce qui me concerne, Michelle et Chicago... Chicago est devenu mon foyer en premier et puis Michelle est devenue l’incarnation de cette connexion que j'avais faite avec un lieu et une communauté. Et ce qui est intéressant, c'est qu'en trouvant ce lieu, j'ai été ensuite capable de comprendre que Hawaï était aussi mon foyer.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Car je pouvais voir désormais comment toutes ces parties de moi s’emboîtaient ensemble.
[La guitare acoustique s'estompe]
[PAUSE]
****
POTUS BARACK OBAMA: Bruce, une des choses dont nous avons beaucoup parlé, c'est... Qu'est-ce qui est fondamentalement américain ? Qu'est-ce qui est exclusivement américain ? Et toi et moi - toi à travers ta musique, moi à travers mon parcours politique - ce que nous avons essayé de faire, en partie, c'est de définir une vision de ce pays, mais aussi le rôle qu'on y joue, la place qu'on y occupe. Te souviens-tu d'un moment où tu t'es dit, en toute conscience, « Je suis un Américain, et c'est mon identité ?»
BRUCE SPRINGSTEEN: Je pense que... Mon premier souvenir remonte à l'époque de l'école Sainte-Rose, chaque matin, à 08 heures. Je prête allégeance au drapeau.
POTUS BARACK OBAMA: Des États-Unis d'Amérique.
BRUCE SPRINGSTEEN: Des États-Unis d'Amérique, et à la République qu'il représente, une nation sous l'autorité de Dieu, indivisible, avec la liberté et la justice pour tous (10). Face au drapeau. Tu poses ta main sur le cœur. Ce geste, je pense, c'est la première fois que je me suis identifié en tant qu'Américain, en me disant qu'il y avait quelque chose de l'ordre du sacré.
POTUS BARACK OBAMA: Pour moi, un autre grand moment... C'était le programme spatial (11).
[Archive audio du lancement d'Apollo 11 : H-moins 10, 9, 8, allumage du double moteur. Le moteur principal s'allume. 4, 3, 2, 1, 0, décollage...]
[Les cordes jouent]
La raison pour laquelle ce moment a été particulièrement important, c'est parce que quand les capsules atterrissent parachutées au milieu du Pacifique...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: ...elles ont été ramenées à Hawaï.
[Archive audio de la récupération d'Apollo 11]
POTUS BARACK OBAMA: Donc, un des mes premiers souvenirs, c'est quand je suis sur les épaules de mon grand-père avec un de ces petits drapeaux américains dont tu parles.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Et je te garantis que nous étions très, très loin de la capsule et de l'astronaute. Mais mon grand-père me disait, « Yeah ! Neil Armstrong t'a fait signe de la main » [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement.
POTUS BARACK OBAMA: Et je suis certain que ce n'était pas vrai, mais dans mon souvenir, tu te dis, « Je suis un compatriote du type qui était dans l'espace »
BRUCE SPRINGSTEEN: Je vois ce que tu veux dire.
POTUS BARACK OBAMA: « C'est ce que nous avons accompli »
[Archive de Neil Armstrong parlant de son retour sur terre après Apollo 11 : Nous sommes heureux d'être de retour et nous attendons impatiemment de sortir de cette quarantaine et de pouvoir parler sans ces vitres entre nous…]
[Les cordes s'estompent]
POTUS BARACK OBAMA: Et puis, pour moi, ce qui a été intéressant, c'est qu'à l'âge de 6 ans, je suis parti vivre à l'étranger. De manière ironique, c'est lorsque j'ai quitté le pays, que je suis devenu fortement patriote. Parce qu'à ce moment-là, tu réalises ce que tu as. Ma mère m'explique que là où nous vivons en Indonésie, le gouvernement au pouvoir est militaire, mais en Amérique, les gens sont élus.
BRUCE SPRINGSTEEN: Ok.
POTUS BARACK OBAMA: Et chacun a une voix. Après, elle le décrivait de façon idéalisé, c'était mythifié, mais cette idée-là commence à germer, « D'accord, nous participons à cette expérience démocratique, où chacun a une voix et où personne n'est meilleur qu'un autre, et où personne n'est pire qu'un autre. Et tu vis dans un pays - à cette époque-là, en Indonésie, il y a encore le scorbut et le rachitisme et la polio - et tu essayes d'expliquer à tes amis, "Tu sais, aux États-Unis, nous prenons soin des gens" ». Et tu sais qu'il y avait un sentiment de supériorité.
BRUCE SPRINGSTEEN: L'exceptionnalisme total. Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Et un exceptionnalisme qui nous a valu toutes sortes de soucis en tant que pays, mais en tant que gamin...
BRUCE SPRINGSTEEN: Tout à fait.
POTUS BARACK OBAMA: Tu te dis, « Je suis heureux d'être né sous ce drapeau ».
BRUCE SPRINGSTEEN: « J'en fais partie »
POTUS BARACK OBAMA: « J'en fais partie ». Exactement.
BRUCE SPRINGSTEEN: Enfant, tu te disais que tu vivais dans le meilleur endroit sur Terre. Et, le premier coup de griffe : je pense à ce qu'aurait donné l'exercice Duck and Cover (12). Avec le nucléaire, tu vois...
[Archives des États-Unis. Film du Bureau de la Défense Civile Duck & Cover : les sirène sonnent...]
POTUS BARACK OBAMA: Oui, moi je n'y ai pas eu droit.
[Archives des États-Unis. Film du Bureau de la Défense Civile Duck & Cover : « Ce signal signifie que vous devez arrêter tout ce que vous faîtes... et regagner un endroit sûr le plus rapidement »... les sirènes s'estompent...]
BRUCE SPRINGSTEEN: Le premier sentiment de peur et de paranoïa. Et je me souviens à l'âge de 13 ans, la crise des missiles de Cuba en 1962 (13). Et les gens avaient vraiment peur.
POTUS BARACK OBAMA: Et ils avaient raison d'avoir peur parce que...
BRUCE SPRINGSTEEN: Le monde allait voler en éclat.
POTUS BARACK OBAMA: [rires] Laisse-moi te dire que quand tu regardes l'histoire de ce qui est arrivé, c'était moins une.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Puis, plus tard, il y a le début de la révolution culturelle et, c'est marrant parce que nous avons parlé du Programme Spatial, et je suis devenu mordu du Programme Spatial en vieillissant.
POTUS BARACK OBAMA: Oui.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mais en 1969, j'étais un gamin de 19 ans qui jouait dans un bar d'Asbury Park le soir où ils ont marché sur la lune. Et, on se disait... « Au diable l'atterrissage sur la lune, mec ».
ENSEMBLE: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: C'est l'oppresseur !
BRUCE SPRINGSTEEN: Encore un coup de l'oppresseur !
POTUS BARACK OBAMA: C'est l'oppresseur !
[Bruce Springsteen - Boom Boom]
BRUCE SPRINGSTEEN: Nous ne voulions rien avoir avec cet événement-là. A 21 heures, nous prenons ces putains de guitares, et c'est tout [rires] Donc, la salle... [rires] Il y avait 50 personnes dans la salle. 25 voulaient regarder l'alunissage à la télévision.
POTUS BARACK OBAMA: Ok.
[Archive télévisée de l'alunissage d'Apollo 11: « C'est un grand pas pour l'homme...]
BRUCE SPRINGSTEEN: Et 25 voulaient que le groupe joue.
[Bruce Springsteen - Boom Boom : “Boom, Boom, Boom! I want to shoot you right down!...”]
BRUCE SPRINGSTEEN: Et donc ce que nous avons fait, c'est rester sur la scène. Il y avait ce petit téléviseur noir et blanc. La retransmission commençait. Les gens venaient vers le groupe et nous disaient, « Faites de la musique, bon Dieu, les gars ! ». Donc, nous avons commencé à jouer et tout le monde autour, « Fermez vos gueules, les mecs » [rires]
[Archive télévisée de l'alunissage d'Apollo 11: « la surface est fine et poudreuse »...]
Et finalement, j'avais un bassiste qui était féru de technologie, et il nous a dit, « Les gars, vous êtes vraiment des bouseux. Je quitte le groupe. Je vais regarder l’alunissage » [rires]
[Bruce Springsteen - Boom Boom]
POTUS BARACK OBAMA: Au milieu du concert ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Au milieu du concert !
POTUS BARACK OBAMA: Et il avait raison.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et il avait raison !
POTUS BARACK OBAMA: Allez, mec.
BRUCE SPRINGSTEEN: Je sais qu'il avait raison. Il est descendu de la scène et c'était terminé [rires] En y repensant, nous étions tous des idiots à cette époque-là, mais, c'était marrant.
[Bruce Springsteen - Boom Boom s'estompe]
BRUCE SPRINGSTEEN: Je pense que... Mon premier souvenir remonte à l'époque de l'école Sainte-Rose, chaque matin, à 08 heures. Je prête allégeance au drapeau.
POTUS BARACK OBAMA: Des États-Unis d'Amérique.
BRUCE SPRINGSTEEN: Des États-Unis d'Amérique, et à la République qu'il représente, une nation sous l'autorité de Dieu, indivisible, avec la liberté et la justice pour tous (10). Face au drapeau. Tu poses ta main sur le cœur. Ce geste, je pense, c'est la première fois que je me suis identifié en tant qu'Américain, en me disant qu'il y avait quelque chose de l'ordre du sacré.
POTUS BARACK OBAMA: Pour moi, un autre grand moment... C'était le programme spatial (11).
[Archive audio du lancement d'Apollo 11 : H-moins 10, 9, 8, allumage du double moteur. Le moteur principal s'allume. 4, 3, 2, 1, 0, décollage...]
[Les cordes jouent]
La raison pour laquelle ce moment a été particulièrement important, c'est parce que quand les capsules atterrissent parachutées au milieu du Pacifique...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: ...elles ont été ramenées à Hawaï.
[Archive audio de la récupération d'Apollo 11]
POTUS BARACK OBAMA: Donc, un des mes premiers souvenirs, c'est quand je suis sur les épaules de mon grand-père avec un de ces petits drapeaux américains dont tu parles.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Et je te garantis que nous étions très, très loin de la capsule et de l'astronaute. Mais mon grand-père me disait, « Yeah ! Neil Armstrong t'a fait signe de la main » [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement.
POTUS BARACK OBAMA: Et je suis certain que ce n'était pas vrai, mais dans mon souvenir, tu te dis, « Je suis un compatriote du type qui était dans l'espace »
BRUCE SPRINGSTEEN: Je vois ce que tu veux dire.
POTUS BARACK OBAMA: « C'est ce que nous avons accompli »
[Archive de Neil Armstrong parlant de son retour sur terre après Apollo 11 : Nous sommes heureux d'être de retour et nous attendons impatiemment de sortir de cette quarantaine et de pouvoir parler sans ces vitres entre nous…]
[Les cordes s'estompent]
POTUS BARACK OBAMA: Et puis, pour moi, ce qui a été intéressant, c'est qu'à l'âge de 6 ans, je suis parti vivre à l'étranger. De manière ironique, c'est lorsque j'ai quitté le pays, que je suis devenu fortement patriote. Parce qu'à ce moment-là, tu réalises ce que tu as. Ma mère m'explique que là où nous vivons en Indonésie, le gouvernement au pouvoir est militaire, mais en Amérique, les gens sont élus.
BRUCE SPRINGSTEEN: Ok.
POTUS BARACK OBAMA: Et chacun a une voix. Après, elle le décrivait de façon idéalisé, c'était mythifié, mais cette idée-là commence à germer, « D'accord, nous participons à cette expérience démocratique, où chacun a une voix et où personne n'est meilleur qu'un autre, et où personne n'est pire qu'un autre. Et tu vis dans un pays - à cette époque-là, en Indonésie, il y a encore le scorbut et le rachitisme et la polio - et tu essayes d'expliquer à tes amis, "Tu sais, aux États-Unis, nous prenons soin des gens" ». Et tu sais qu'il y avait un sentiment de supériorité.
BRUCE SPRINGSTEEN: L'exceptionnalisme total. Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Et un exceptionnalisme qui nous a valu toutes sortes de soucis en tant que pays, mais en tant que gamin...
BRUCE SPRINGSTEEN: Tout à fait.
POTUS BARACK OBAMA: Tu te dis, « Je suis heureux d'être né sous ce drapeau ».
BRUCE SPRINGSTEEN: « J'en fais partie »
POTUS BARACK OBAMA: « J'en fais partie ». Exactement.
BRUCE SPRINGSTEEN: Enfant, tu te disais que tu vivais dans le meilleur endroit sur Terre. Et, le premier coup de griffe : je pense à ce qu'aurait donné l'exercice Duck and Cover (12). Avec le nucléaire, tu vois...
[Archives des États-Unis. Film du Bureau de la Défense Civile Duck & Cover : les sirène sonnent...]
POTUS BARACK OBAMA: Oui, moi je n'y ai pas eu droit.
[Archives des États-Unis. Film du Bureau de la Défense Civile Duck & Cover : « Ce signal signifie que vous devez arrêter tout ce que vous faîtes... et regagner un endroit sûr le plus rapidement »... les sirènes s'estompent...]
BRUCE SPRINGSTEEN: Le premier sentiment de peur et de paranoïa. Et je me souviens à l'âge de 13 ans, la crise des missiles de Cuba en 1962 (13). Et les gens avaient vraiment peur.
POTUS BARACK OBAMA: Et ils avaient raison d'avoir peur parce que...
BRUCE SPRINGSTEEN: Le monde allait voler en éclat.
POTUS BARACK OBAMA: [rires] Laisse-moi te dire que quand tu regardes l'histoire de ce qui est arrivé, c'était moins une.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Puis, plus tard, il y a le début de la révolution culturelle et, c'est marrant parce que nous avons parlé du Programme Spatial, et je suis devenu mordu du Programme Spatial en vieillissant.
POTUS BARACK OBAMA: Oui.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mais en 1969, j'étais un gamin de 19 ans qui jouait dans un bar d'Asbury Park le soir où ils ont marché sur la lune. Et, on se disait... « Au diable l'atterrissage sur la lune, mec ».
ENSEMBLE: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: C'est l'oppresseur !
BRUCE SPRINGSTEEN: Encore un coup de l'oppresseur !
POTUS BARACK OBAMA: C'est l'oppresseur !
[Bruce Springsteen - Boom Boom]
BRUCE SPRINGSTEEN: Nous ne voulions rien avoir avec cet événement-là. A 21 heures, nous prenons ces putains de guitares, et c'est tout [rires] Donc, la salle... [rires] Il y avait 50 personnes dans la salle. 25 voulaient regarder l'alunissage à la télévision.
POTUS BARACK OBAMA: Ok.
[Archive télévisée de l'alunissage d'Apollo 11: « C'est un grand pas pour l'homme...]
BRUCE SPRINGSTEEN: Et 25 voulaient que le groupe joue.
[Bruce Springsteen - Boom Boom : “Boom, Boom, Boom! I want to shoot you right down!...”]
BRUCE SPRINGSTEEN: Et donc ce que nous avons fait, c'est rester sur la scène. Il y avait ce petit téléviseur noir et blanc. La retransmission commençait. Les gens venaient vers le groupe et nous disaient, « Faites de la musique, bon Dieu, les gars ! ». Donc, nous avons commencé à jouer et tout le monde autour, « Fermez vos gueules, les mecs » [rires]
[Archive télévisée de l'alunissage d'Apollo 11: « la surface est fine et poudreuse »...]
Et finalement, j'avais un bassiste qui était féru de technologie, et il nous a dit, « Les gars, vous êtes vraiment des bouseux. Je quitte le groupe. Je vais regarder l’alunissage » [rires]
[Bruce Springsteen - Boom Boom]
POTUS BARACK OBAMA: Au milieu du concert ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Au milieu du concert !
POTUS BARACK OBAMA: Et il avait raison.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et il avait raison !
POTUS BARACK OBAMA: Allez, mec.
BRUCE SPRINGSTEEN: Je sais qu'il avait raison. Il est descendu de la scène et c'était terminé [rires] En y repensant, nous étions tous des idiots à cette époque-là, mais, c'était marrant.
[Bruce Springsteen - Boom Boom s'estompe]
****
POTUS BARACK OBAMA: Comment tu... Il y a un léger trou générationnel entre nous parce que moi je découvre la contre-culture à sa toute fin. Elle était déjà en train de disparaître.
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement.
POTUS BARACK OBAMA: Mais la cassure en... 67 et 68, avec les manifestations contre la guerre au Vietnam et...
BRUCE SPRINGSTEEN: Le Mouvement pour les droits civiques.
POTUS BARACK OBAMA: Le Mouvement pour les droits civiques. Il y a un vrai bouleversement à ce moment-là. Comment tu te positionnes à l'époque ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Je pense qu'il y a eu une vraie période de désenchantement, tu vois ? Je me souviens, j'étais jeune, 1965, 15 ans, 1966, 16 ans, je me considérais de toute façon comme un outsider, à cause de la vie que j'avais choisie. J'étais une sorte de faux hippie. Je n'étais pas vraiment hippie. J'ai toujours gardé un pied dans le monde ouvrier et un pied dans le monde de la contre-culture, et je n'ai jamais vraiment appartenu à aucun des deux mondes d'ailleurs. Mais, tu acquiers l'impression que le système est truqué et porte préjudice à un certain nombre de citoyens.
POTUS BARACK OBAMA: Tu avais l'âge pour être appelé sous les drapeaux.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Qu'est-ce qu'il s'est passé alors ?
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: C'était la loterie pour l'incorporation ou...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui, oui... Ce qu'il s'est passé, c'était que... Ma tante a tiré quelques ficelles et m'a fait inscrire à une université.
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: J'ai donc passé une année à l'université.
POTUS BARACK OBAMA: D'accord. Donc, tu as eu un sursis.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Ensuite, j'ai rencontré un type à New York. Il voulait me faire signer un contrat discographique. A 19 ans. Je me suis cru au Paradis. Il m'a dit, « Tu dois arrêter les études, si pour toi la musique, c'est du sérieux ». Je n'avais pas le moindre problème à arrêter les études. J'étais même content [rires] « Mais si j'arrête... »
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: « Je risque d'être incorporé »
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: Il me dit, « Aucun souci. J'ai tout arrangé, tu sais. Ce n'est pas un problème... »
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: Je rentre à la maison. Je dis à mes parents, « Je laisse tomber les études. La musique, c'est ce que je veux faire dans la vie ». Ils m'ont donné leur bénédiction à contre-cœur, et j'ai abandonné les études. Et quelque mois plus tard, deux ou trois mois plus tard, j'ai reçu dans la boite aux lettres mon ordre d'incorporation pour servir sous les drapeaux [rires]. On était en 1968.
POTUS BARACK OBAMA: Oui, on est donc en plein milieu.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui, alors je me suis dis, « Je vais appeler le type à New York ». Um, je n'ai jamais pu l'avoir au téléphone.
POTUS BARACK OBAMA: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Il n'a plus jamais répondu à un seul de mes appels.
POTUS BARACK OBAMA: Oui, il n'a pas répondu.
BRUCE SPRINGSTEEN: Pas un seul appel. Donc... crois le ou pas, moi et deux autres types de mon groupe avons été convoqué exactement le même jour. Tous les trois.
POTUS BARACK OBAMA: Du groupe ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Tous les trois dans le bus pour Newark. De bon matin, nous nous sommes tous retrouvés sur le parking devant le Centre de Sélection d'Asbury Park. Tout le monde est aligné. Il y a 80% de jeunes noirs d'Asbury Park, peut-être 20% de blancs – que des ouvriers, des travailleurs des usines, rien que des jeunes qui n'allaient pas à l'université.
POTUS BARACK OBAMA: Ceux qui étaient enrôlés sous les drapeaux.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tout à fait. Boom, nous sommes tous dans le bus. Nous y allons. Certains avaient préparé leur coup. Tu sais, l'un deux avait un plâtre sur pratiquement tout le corps, complètement bidon.
ENSEMBLE: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Donc... [rires] Donc... Il y a une seule et unique chose que je sais. Je vais à Newark, mais après je rentre à la maison. Quoi qu'il en coûte. Pour plusieurs raisons, 1) Je ne crois pas à la guerre, et en 1968, pas grand monde y croyait.
POTUS BARACK OBAMA: Mmm.
BRUCE SPRINGSTEEN: 2) J'avais des amis qui étaient morts là-bas, 3) Je ne voulais pas mourir. Donc, nous arrivons sur place et je tente tout ce qui est possible. Je signe, je signe des papiers... Je les embobine complètement. De leur point de vue, je suis...
POTUS BARACK OBAMA: Déficient mentalement.
BRUCE SPRINGSTEEN: Gay, drogué [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Tout l'attirail.
BRUCE SPRINGSTEEN: Ah, guitariste...
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et j'avais subi une commotion cérébrale, ce qui était vrai. J'avais eu un terrible accident de moto sept mois plus tôt et j'ai eu une commotion cérébrale. Et finalement, tu marches dans ce long couloir et la journée est longue – surtout quand tu n'as raconté que des conneries [rires].
POTUS BARACK OBAMA: Et à ce stade, les médecins connaissaient toutes les combines. Tu n'es pas original.
BRUCE SPRINGSTEEN: Non.
POTUS BARACK OBAMA: A 19 ans, tu ne penses à rien de nouveau qui n'a pas été déjà fait 100 fois.
BRUCE SPRINGSTEEN: Donc, j'attends. Tu es dans un long couloir. C'est un couloir vide. Il y a un type derrière un bureau. Il lève la tête, te regarde et dit, « Désolé M. Springsteen, vous n'avez pas été retenu par l'Armée ».
POTUS BARACK OBAMA: Tu as souris ou tu es resté grave et triste ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Très grave et triste [rires] J'ai dit, Oh.
POTUS BARACK OBAMA: « Pourquoi ? »
BRUCE SPRINGSTEEN: Et il m'a dit, « Vous pouvez partir ». Je suis donc parti. J'ai ouvert la porte et je me suis retrouvé dehors avec certains types qui étaient dans le bus avec moi. Je ne savais pas ce qu'ils avaient fait, mais ils étaient dehors également. Et il y a eu une fête dans la rue à Newark, New Jersey [rires] avec quelques types juste heureux de ne pas avoir été enrôlés.
POTUS BARACK OBAMA: Qu'est-il arrivé aux autres membres du groupe ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Tout le monde a été réformé.
POTUS BARACK OBAMA: Intéressant.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et j'ai été classé 4-F, ce qui correspondait à ma commotion cérébrale. Tu vois ? Certains ont été jugés inaptes pour raison mentale, pour avoir inventé des trucs qui étaient [rires] aussi excentriques, voire bien plus que les miens. Mais c'était l'époque qui voulait ça, tu vois... Je n'ai eu aucun doute sur le fait que je rentrerais à la maison.
POTUS BARACK OBAMA: En ce qui me concerne, lorsque j'arrive à l'adolescence, l'Amérique n'est impliquée dans aucune guerre où le contingent est envoyé au front.
BRUCE SPRINGSTEEN: D'accord.
POTUS BARACK OBAMA: Par conséquent, les controverses sur la guerre du Vietnam n'ont pas eu de rôle formateur pour moi.
BRUCE SPRINGSTEEN: D'accord.
POTUS BARACK OBAMA: Tu comprends ? C'est un fait historique que je connais, mais que je ne l'ai pas vécu. Lorsque je suis devenu président, les leçons durement apprises au Vietnam avaient été retenues. Les citoyens avaient compris que nous avions causé du tort aux anciens combattants du Vietnam, en les stigmatisant d'une manière ou d'une autre. De mauvaises décisions avaient été prises à Washington et pourtant, soudain, ce sont les anciens combattants qui ont été entachés par ces décisions. Les américains en sont venus à reconnaitre et à révérer l'action de nos soldats, y compris ceux qui étaient critiques de certains des aspects de l'intervention américaine. Au moment où j'ai l'honneur de devenir commandant en chef, j'ai une grande admiration pour notre armée, et ce qu'elle est en mesure d'accomplir. Sa capacité à prendre un gamin de 20 ans, issu d'une petite ville rurale du Sud, ou un enfant de banlieue, ou du New Jersey, et à en faire un adulte responsable d'équipements de plusieurs milliards de dollars, qui commandera ses camarades dans des combats incroyables.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Ce dont tu te rends compte, c'est qu'il est possible de révérer le sacrifice, le courage, la bravoure, les traditions de nos armées, tout en affirmant que la guerre est un enfer, et que nous n'avons pas toujours pris les bonnes décisions dans les guerres où nous nous sommes engagés. Je le dis uniquement à titre d'exemple, pour faire comprendre en quels termes je réfléchis à l'Amérique. Je peux regarder en face toutes les erreurs, les péchés, la cruauté et la violence du pays, tout en affirmant, « Oui, c'est vrai. Et pourtant, regardez ce qui est possible. Regardez comment ça s'est déroulé. Regardez la beauté, l'audace et l'exploit, même quand les idéaux sont bafoués ou trahis. Mais ces idéaux proprement dits sont puissants, ce sont des balises. Ils méritent qu'on se batte pour eux afin de les préserver ».
Et tu sais, quand je t'entends parler de la conscription et du Vietnam, des amis que tu as perdus et de la façon dont le pays s'est déchiré au sujet de cette guerre, je me souviens en avoir parlé à des amis qui étaient aller là-bas et qui en sont revenus et qui ont découvert qu'on les traitait de "tueurs de bébés" et on leur crachait dessus et ils sont devenus, quelque part, les objets d'un rejet de cette guerre par les jeunes en particulier, alors qu'ils n'étaient que des gamins qui exprimaient leur patriotisme, accomplissant leur devoir.
BRUCE SPRINGSTEEN: Les soldats à cette époque-là, je connais beaucoup de vétérans, et ils ont été ignorés et mal traités pendant une longue période, reconnus comme les symboles de, je cite, « La seule guerre que l'Amérique ait jamais perdue ».
POTUS BARACK OBAMA: Et je pense que c'est l'occasion qui a grandement fait mûrir l'Amérique.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Être capable de distinguer les politiques conduites par des hommes en costumes à Washington avec le professionnalisme et le sens du sacrifice et...
BRUCE SPRINGSTEEN: Tout à fait.
POTUS BARACK OBAMA: ...le courage qu'ont montré ceux qui ont combattu.
BRUCE SPRINGSTEEN: C'était un événement majeur. C'était la première fois de ma vie...
[Le synthétiseur joue]
...où j'ai eu le sentiment que le pays s'était égaré.
POTUS BARACK OBAMA: Exactement.
BRUCE SPRINGSTEEN: Complètement égaré. Entre les amis perdus et ma propre expérience, il s'agissait de la perte de l'innocence.
[La guitare et le synthétiseur jouent puis disparaissent]
BRUCE SPRINGSTEEN: Exactement.
POTUS BARACK OBAMA: Mais la cassure en... 67 et 68, avec les manifestations contre la guerre au Vietnam et...
BRUCE SPRINGSTEEN: Le Mouvement pour les droits civiques.
POTUS BARACK OBAMA: Le Mouvement pour les droits civiques. Il y a un vrai bouleversement à ce moment-là. Comment tu te positionnes à l'époque ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Je pense qu'il y a eu une vraie période de désenchantement, tu vois ? Je me souviens, j'étais jeune, 1965, 15 ans, 1966, 16 ans, je me considérais de toute façon comme un outsider, à cause de la vie que j'avais choisie. J'étais une sorte de faux hippie. Je n'étais pas vraiment hippie. J'ai toujours gardé un pied dans le monde ouvrier et un pied dans le monde de la contre-culture, et je n'ai jamais vraiment appartenu à aucun des deux mondes d'ailleurs. Mais, tu acquiers l'impression que le système est truqué et porte préjudice à un certain nombre de citoyens.
POTUS BARACK OBAMA: Tu avais l'âge pour être appelé sous les drapeaux.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui.
POTUS BARACK OBAMA: Qu'est-ce qu'il s'est passé alors ?
BRUCE SPRINGSTEEN: [rires]
POTUS BARACK OBAMA: C'était la loterie pour l'incorporation ou...
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui, oui... Ce qu'il s'est passé, c'était que... Ma tante a tiré quelques ficelles et m'a fait inscrire à une université.
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: J'ai donc passé une année à l'université.
POTUS BARACK OBAMA: D'accord. Donc, tu as eu un sursis.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Ensuite, j'ai rencontré un type à New York. Il voulait me faire signer un contrat discographique. A 19 ans. Je me suis cru au Paradis. Il m'a dit, « Tu dois arrêter les études, si pour toi la musique, c'est du sérieux ». Je n'avais pas le moindre problème à arrêter les études. J'étais même content [rires] « Mais si j'arrête... »
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: « Je risque d'être incorporé »
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: Il me dit, « Aucun souci. J'ai tout arrangé, tu sais. Ce n'est pas un problème... »
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: Je rentre à la maison. Je dis à mes parents, « Je laisse tomber les études. La musique, c'est ce que je veux faire dans la vie ». Ils m'ont donné leur bénédiction à contre-cœur, et j'ai abandonné les études. Et quelque mois plus tard, deux ou trois mois plus tard, j'ai reçu dans la boite aux lettres mon ordre d'incorporation pour servir sous les drapeaux [rires]. On était en 1968.
POTUS BARACK OBAMA: Oui, on est donc en plein milieu.
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui, alors je me suis dis, « Je vais appeler le type à New York ». Um, je n'ai jamais pu l'avoir au téléphone.
POTUS BARACK OBAMA: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Il n'a plus jamais répondu à un seul de mes appels.
POTUS BARACK OBAMA: Oui, il n'a pas répondu.
BRUCE SPRINGSTEEN: Pas un seul appel. Donc... crois le ou pas, moi et deux autres types de mon groupe avons été convoqué exactement le même jour. Tous les trois.
POTUS BARACK OBAMA: Du groupe ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Oui. Tous les trois dans le bus pour Newark. De bon matin, nous nous sommes tous retrouvés sur le parking devant le Centre de Sélection d'Asbury Park. Tout le monde est aligné. Il y a 80% de jeunes noirs d'Asbury Park, peut-être 20% de blancs – que des ouvriers, des travailleurs des usines, rien que des jeunes qui n'allaient pas à l'université.
POTUS BARACK OBAMA: Ceux qui étaient enrôlés sous les drapeaux.
BRUCE SPRINGSTEEN: Tout à fait. Boom, nous sommes tous dans le bus. Nous y allons. Certains avaient préparé leur coup. Tu sais, l'un deux avait un plâtre sur pratiquement tout le corps, complètement bidon.
ENSEMBLE: [rires]
BRUCE SPRINGSTEEN: Donc... [rires] Donc... Il y a une seule et unique chose que je sais. Je vais à Newark, mais après je rentre à la maison. Quoi qu'il en coûte. Pour plusieurs raisons, 1) Je ne crois pas à la guerre, et en 1968, pas grand monde y croyait.
POTUS BARACK OBAMA: Mmm.
BRUCE SPRINGSTEEN: 2) J'avais des amis qui étaient morts là-bas, 3) Je ne voulais pas mourir. Donc, nous arrivons sur place et je tente tout ce qui est possible. Je signe, je signe des papiers... Je les embobine complètement. De leur point de vue, je suis...
POTUS BARACK OBAMA: Déficient mentalement.
BRUCE SPRINGSTEEN: Gay, drogué [rires]
POTUS BARACK OBAMA: Tout l'attirail.
BRUCE SPRINGSTEEN: Ah, guitariste...
POTUS BARACK OBAMA: D'accord.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et j'avais subi une commotion cérébrale, ce qui était vrai. J'avais eu un terrible accident de moto sept mois plus tôt et j'ai eu une commotion cérébrale. Et finalement, tu marches dans ce long couloir et la journée est longue – surtout quand tu n'as raconté que des conneries [rires].
POTUS BARACK OBAMA: Et à ce stade, les médecins connaissaient toutes les combines. Tu n'es pas original.
BRUCE SPRINGSTEEN: Non.
POTUS BARACK OBAMA: A 19 ans, tu ne penses à rien de nouveau qui n'a pas été déjà fait 100 fois.
BRUCE SPRINGSTEEN: Donc, j'attends. Tu es dans un long couloir. C'est un couloir vide. Il y a un type derrière un bureau. Il lève la tête, te regarde et dit, « Désolé M. Springsteen, vous n'avez pas été retenu par l'Armée ».
POTUS BARACK OBAMA: Tu as souris ou tu es resté grave et triste ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Très grave et triste [rires] J'ai dit, Oh.
POTUS BARACK OBAMA: « Pourquoi ? »
BRUCE SPRINGSTEEN: Et il m'a dit, « Vous pouvez partir ». Je suis donc parti. J'ai ouvert la porte et je me suis retrouvé dehors avec certains types qui étaient dans le bus avec moi. Je ne savais pas ce qu'ils avaient fait, mais ils étaient dehors également. Et il y a eu une fête dans la rue à Newark, New Jersey [rires] avec quelques types juste heureux de ne pas avoir été enrôlés.
POTUS BARACK OBAMA: Qu'est-il arrivé aux autres membres du groupe ?
BRUCE SPRINGSTEEN: Tout le monde a été réformé.
POTUS BARACK OBAMA: Intéressant.
BRUCE SPRINGSTEEN: Et j'ai été classé 4-F, ce qui correspondait à ma commotion cérébrale. Tu vois ? Certains ont été jugés inaptes pour raison mentale, pour avoir inventé des trucs qui étaient [rires] aussi excentriques, voire bien plus que les miens. Mais c'était l'époque qui voulait ça, tu vois... Je n'ai eu aucun doute sur le fait que je rentrerais à la maison.
POTUS BARACK OBAMA: En ce qui me concerne, lorsque j'arrive à l'adolescence, l'Amérique n'est impliquée dans aucune guerre où le contingent est envoyé au front.
BRUCE SPRINGSTEEN: D'accord.
POTUS BARACK OBAMA: Par conséquent, les controverses sur la guerre du Vietnam n'ont pas eu de rôle formateur pour moi.
BRUCE SPRINGSTEEN: D'accord.
POTUS BARACK OBAMA: Tu comprends ? C'est un fait historique que je connais, mais que je ne l'ai pas vécu. Lorsque je suis devenu président, les leçons durement apprises au Vietnam avaient été retenues. Les citoyens avaient compris que nous avions causé du tort aux anciens combattants du Vietnam, en les stigmatisant d'une manière ou d'une autre. De mauvaises décisions avaient été prises à Washington et pourtant, soudain, ce sont les anciens combattants qui ont été entachés par ces décisions. Les américains en sont venus à reconnaitre et à révérer l'action de nos soldats, y compris ceux qui étaient critiques de certains des aspects de l'intervention américaine. Au moment où j'ai l'honneur de devenir commandant en chef, j'ai une grande admiration pour notre armée, et ce qu'elle est en mesure d'accomplir. Sa capacité à prendre un gamin de 20 ans, issu d'une petite ville rurale du Sud, ou un enfant de banlieue, ou du New Jersey, et à en faire un adulte responsable d'équipements de plusieurs milliards de dollars, qui commandera ses camarades dans des combats incroyables.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Ce dont tu te rends compte, c'est qu'il est possible de révérer le sacrifice, le courage, la bravoure, les traditions de nos armées, tout en affirmant que la guerre est un enfer, et que nous n'avons pas toujours pris les bonnes décisions dans les guerres où nous nous sommes engagés. Je le dis uniquement à titre d'exemple, pour faire comprendre en quels termes je réfléchis à l'Amérique. Je peux regarder en face toutes les erreurs, les péchés, la cruauté et la violence du pays, tout en affirmant, « Oui, c'est vrai. Et pourtant, regardez ce qui est possible. Regardez comment ça s'est déroulé. Regardez la beauté, l'audace et l'exploit, même quand les idéaux sont bafoués ou trahis. Mais ces idéaux proprement dits sont puissants, ce sont des balises. Ils méritent qu'on se batte pour eux afin de les préserver ».
Et tu sais, quand je t'entends parler de la conscription et du Vietnam, des amis que tu as perdus et de la façon dont le pays s'est déchiré au sujet de cette guerre, je me souviens en avoir parlé à des amis qui étaient aller là-bas et qui en sont revenus et qui ont découvert qu'on les traitait de "tueurs de bébés" et on leur crachait dessus et ils sont devenus, quelque part, les objets d'un rejet de cette guerre par les jeunes en particulier, alors qu'ils n'étaient que des gamins qui exprimaient leur patriotisme, accomplissant leur devoir.
BRUCE SPRINGSTEEN: Les soldats à cette époque-là, je connais beaucoup de vétérans, et ils ont été ignorés et mal traités pendant une longue période, reconnus comme les symboles de, je cite, « La seule guerre que l'Amérique ait jamais perdue ».
POTUS BARACK OBAMA: Et je pense que c'est l'occasion qui a grandement fait mûrir l'Amérique.
BRUCE SPRINGSTEEN: Mhmm.
POTUS BARACK OBAMA: Être capable de distinguer les politiques conduites par des hommes en costumes à Washington avec le professionnalisme et le sens du sacrifice et...
BRUCE SPRINGSTEEN: Tout à fait.
POTUS BARACK OBAMA: ...le courage qu'ont montré ceux qui ont combattu.
BRUCE SPRINGSTEEN: C'était un événement majeur. C'était la première fois de ma vie...
[Le synthétiseur joue]
...où j'ai eu le sentiment que le pays s'était égaré.
POTUS BARACK OBAMA: Exactement.
BRUCE SPRINGSTEEN: Complètement égaré. Entre les amis perdus et ma propre expérience, il s'agissait de la perte de l'innocence.
[La guitare et le synthétiseur jouent puis disparaissent]
****
NOTES
(1) Jour de la fête nationale américaine.
(2) L’United States Secret Service est une agence gouvernementale dépendante du Département de la Sécurité intérieure des États-Unis, qui a pour mission de lutter contre la fraude financière et d'assurer la protection du président des États-Unis, du vice-président, et de leur famille.
(3) Les bus de la compagnie américaine Greyhound Lines (fondée en 1914) transportent des passagers par autocar à travers toute l'Amérique du Nord.
(4) Howard Johnson est une chaîne d'hôtels et de motels situés principalement aux États-Unis.
(5) La Commission Sénatoriale Américaine du Watergate, était une commission mise en place après le scandale du Watergate (une affaire d'espionnage politique où des cambrioleurs sont arrêtés dans les locaux du parti Démocrate à Washington en 1972), et qui a abouti à la démission de Richard Nixon, alors président républicain des États-Unis, en 1974. Cette commission d'enquête a conclu à la culpabilité du président Nixon et à son rôle actif dans la mise sur écoute du bâtiment du parti Démocrate, dans les pressions sur la CIA et le FBI pour étouffer l'affaire et sur la falsification de documents visant à discréditer de hautes personnalités publiques et privées.
(6) Le Maccarthysme est une période de l'histoire américaine, qui trouve ses origines dans le fort sentiment anticommuniste qui s'était développé aux États-Unis dans le contexte de la guerre froide. Il s'étend de 1950, avec l'apparition du sénateur Joseph McCarthy sur le devant de la scène politique américaine, à 1954. Pendant deux ans (1953-1954), une commission présidée par McCarthy traqua d'éventuels agents, militants ou sympathisants communistes aux États-Unis.
(7) Shane (L'Homme des Vallées Perdues, 1953) est un western américain réalisé par George Stevens.
(8) High Plains Drifter (L'Homme des Hautes Plaines, 1973) est un western américain réalisé par Clint Eastwood.
(9) The Searchers (La Prisonnière du désert, 1956) est film américain de John Ford, avec John Wayne, Jeffrey Hunter et Natalie Wood.
(10) Le serment d'allégeance au drapeau des États-Unis est un serment mis en place dans les écoles américaines le 12 octobre 1892, jour du 400ème anniversaire de la découverte de l'Amérique. Cette première version a depuis été modifiée, puis approuvé dans sa forme actuelle par une loi du Congrès du 18 juin 1941: « Je jure allégeance au drapeau des États-Unis d'Amérique et à la République qu'il représente, une nation unie sous l'autorité de Dieu, indivisible, avec la liberté et la justice pour tous » Le salut au drapeau et le serment d'allégeance se fait la main posée sur le cœur.
(11) Le programme Apollo est le programme spatial de la NASA mené durant la période 1961-1972, qui a permis aux États-Unis d'envoyer pour la première fois des hommes sur la Lune, le 21 juillet 1969, remplissant l'objectif fixé par le président John F. Kennedy. Il s'agissait de démontrer la supériorité des États-Unis sur l'Union soviétique, qui avait été mise à mal par les succès soviétiques au début de l'ère spatiale, dans le contexte de la guerre froide qui oppose alors ces deux pays.
(12) Duck and Cover est un court métrage de propagande américain de 1952, destiné aux enfants et projeté dans les écoles. Il apprenait aux enfants ce qu'il fallait faire en cas d'attaque nucléaire.
(13) La crise des missiles de Cuba est une suite d'événements survenus du 16 au 28 octobre 1962, et qui ont opposé les États-Unis et l'Union soviétique au sujet des missiles nucléaires soviétiques pointés en direction du territoire des États-Unis depuis l'île de Cuba.
Cet épisode a été diffusé pour la première fois le 08 mars 2021.
(1) Jour de la fête nationale américaine.
(2) L’United States Secret Service est une agence gouvernementale dépendante du Département de la Sécurité intérieure des États-Unis, qui a pour mission de lutter contre la fraude financière et d'assurer la protection du président des États-Unis, du vice-président, et de leur famille.
(3) Les bus de la compagnie américaine Greyhound Lines (fondée en 1914) transportent des passagers par autocar à travers toute l'Amérique du Nord.
(4) Howard Johnson est une chaîne d'hôtels et de motels situés principalement aux États-Unis.
(5) La Commission Sénatoriale Américaine du Watergate, était une commission mise en place après le scandale du Watergate (une affaire d'espionnage politique où des cambrioleurs sont arrêtés dans les locaux du parti Démocrate à Washington en 1972), et qui a abouti à la démission de Richard Nixon, alors président républicain des États-Unis, en 1974. Cette commission d'enquête a conclu à la culpabilité du président Nixon et à son rôle actif dans la mise sur écoute du bâtiment du parti Démocrate, dans les pressions sur la CIA et le FBI pour étouffer l'affaire et sur la falsification de documents visant à discréditer de hautes personnalités publiques et privées.
(6) Le Maccarthysme est une période de l'histoire américaine, qui trouve ses origines dans le fort sentiment anticommuniste qui s'était développé aux États-Unis dans le contexte de la guerre froide. Il s'étend de 1950, avec l'apparition du sénateur Joseph McCarthy sur le devant de la scène politique américaine, à 1954. Pendant deux ans (1953-1954), une commission présidée par McCarthy traqua d'éventuels agents, militants ou sympathisants communistes aux États-Unis.
(7) Shane (L'Homme des Vallées Perdues, 1953) est un western américain réalisé par George Stevens.
(8) High Plains Drifter (L'Homme des Hautes Plaines, 1973) est un western américain réalisé par Clint Eastwood.
(9) The Searchers (La Prisonnière du désert, 1956) est film américain de John Ford, avec John Wayne, Jeffrey Hunter et Natalie Wood.
(10) Le serment d'allégeance au drapeau des États-Unis est un serment mis en place dans les écoles américaines le 12 octobre 1892, jour du 400ème anniversaire de la découverte de l'Amérique. Cette première version a depuis été modifiée, puis approuvé dans sa forme actuelle par une loi du Congrès du 18 juin 1941: « Je jure allégeance au drapeau des États-Unis d'Amérique et à la République qu'il représente, une nation unie sous l'autorité de Dieu, indivisible, avec la liberté et la justice pour tous » Le salut au drapeau et le serment d'allégeance se fait la main posée sur le cœur.
(11) Le programme Apollo est le programme spatial de la NASA mené durant la période 1961-1972, qui a permis aux États-Unis d'envoyer pour la première fois des hommes sur la Lune, le 21 juillet 1969, remplissant l'objectif fixé par le président John F. Kennedy. Il s'agissait de démontrer la supériorité des États-Unis sur l'Union soviétique, qui avait été mise à mal par les succès soviétiques au début de l'ère spatiale, dans le contexte de la guerre froide qui oppose alors ces deux pays.
(12) Duck and Cover est un court métrage de propagande américain de 1952, destiné aux enfants et projeté dans les écoles. Il apprenait aux enfants ce qu'il fallait faire en cas d'attaque nucléaire.
(13) La crise des missiles de Cuba est une suite d'événements survenus du 16 au 28 octobre 1962, et qui ont opposé les États-Unis et l'Union soviétique au sujet des missiles nucléaires soviétiques pointés en direction du territoire des États-Unis depuis l'île de Cuba.
Cet épisode a été diffusé pour la première fois le 08 mars 2021.
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Renegades: Born in the U.S.A. is a Spotify Original
Presented and produced by Higher Ground Audio in collaboration with Dustlight Productions.
From Higher Ground Audio: Dan Fierman, Anna Holmes, Mukta Mohan, and Joe Paulsen are executive producers.
Carolyn Lipka and Adam Sachs are consulting producers.
Janae Marable is our Editorial Assistant.
From Dustlight Productions: Misha Euceph and Arwen Nicks are executive producers.
Elizabeth Nakano, Mary Knauf and Tamika Adams are producers.
Mary Knauf is also editor.
Andrew Eapen is our composer and mix engineer.
Rainier Harris is our apprentice.
Transcriptions by David Rodrigruez.
Special thanks to Rachael Garcia, the Dustlight development and operations coordinator.
Daniel Ek, Dawn Ostroff and Courtney Holt are executive producers for Spotify.
Gimlet and Lydia Polgreen are consulting producers.
Music Supervision by Search Party Music.
From the Great State of New Jersey, special thanks to: Jon Landau, Thom Zimny, Rob Lebret, Rob DeMartin, and Barbara Carr.
We also want to thank: Adrienne Gerard, Marilyn Laverty, Tracy Nurse, Greg Linn and Betsy Whitney.
And a special thanks to Patti Scialfa for her encouragement and inspiration.
And to Evan, Jess and Sam Springsteen.
From the District of Columbia, thanks to: Kristina Schake, MacKenzie Smith, Katie Hill, Eric Schultz, Caroline Adler Morales, Merone Hailemeskel, Alex Platkin, Kristin Bartoloni and Cody Keenan.
And a special thanks to Michelle, Malia and Sasha Obama.
This is Renegades: Born in the U.S.A.
ANNA HOLMES: And thanks again to our sponsors Dollar Shave Club and Comcast.
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